Point de situation relatif à l’ouragan Irma

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Édouard Philippe.

Publié 11/09/2017

Point presse de M. Edouard PHILIPPE, Premier ministre

Point de situation relatif à l’ouragan Irma

Hôtel de Matignon

Lundi 11 septembre 2017
Quelques heures avant le déplacement du Président de la République, j’ai tenu à organiser une réunion avec les principaux ministres concernés pour faire le point de la situation sur les deux îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, pour préparer dès aujourd’hui le travail de reconstruction qui nous attend.
Je voudrais au préalable saluer l’engagement sans faille des agents de l’Etat, sapeurs-pompiers, militaires de la Gendarmerie et de la Sécurité civile, personnels de santé, personnels des forces armées, pour gérer sur place une situation d’urgence dans des conditions difficiles.
Après la gestion de l’urgence, la responsabilité de l’Etat est d’anticiper la reconstruction et de préparer le long terme. C’est pourquoi j’ai souhaité que soient présents au sein de la réunion qui était organisée, il y a quelques minutes, à Matignon, une partie des experts qui partiront dès ce soir sur place, avec le Président de la République.
J’ai également demandé – je les remercie d’avoir accepté – aux trois grands opérateurs de réseaux présents sur l’île de Saint-Martin, EDF, VEOLIA et ORANGE, d’être présents et de travailler en bonne intelligence avec les services de l’Etat, pour préparer à la fois la gestion de l’urgence et la reconstruction.
Enfin, nous avons voulu, sans attendre, mobiliser les financements. C’est pourquoi nous avons associé à nos travaux l’Agence française de développement et la Caisse des dépôts et consignations, ainsi que la Fédération française de l’assurance, qui, sur la base de l’arrêté de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle qui a été publié samedi dernier, peut engager la prise en charge des dégâts subis par les particuliers et par les entreprises.
Avant d’évoquer la reconstruction, je souhaite vous faire un point sur la question des départs de l’île de Saint-Martin. Depuis le début des évènements, l’Etat a pris en charge de façon prioritaire l’évacuation des personnes les plus fragiles et en particulier celle des malades qui ne pouvaient pas être pris en charge sur place par les centres hospitaliers de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy. Nous continuerons évidemment à le faire.
Au-delà de ces situations, de nombreux habitants des deux îles souhaitent rejoindre la Guadeloupe ou la métropole. Je comprends parfaitement la fatigue, l’angoisse du dénuement, le besoin de répit qu’ils manifestent. Je comprends également l’impatience de voir les liaisons aériennes et maritimes pleinement rétablies. Quand elles le seront pleinement, sans doute progressivement cette semaine, elles offriront une capacité de transport de l'ordre de 2 000 à 2 500 personnes par jour.
La ministre des Outre-Mer et le président de la Collectivité ont convenu hier des modalités nécessaires à l’organisation de ces départs volontaires. La Collectivité centralisera les demandes et constituera des listes de départ, en donnant la priorité aux personnes les plus fragiles et dont les logements seraient inhabitables, notamment les personnes âgées, les familles avec de jeunes enfants. La solidarité de l'Etat et des collectivités territoriales sera mis en œuvre pour la prise en charge du transport et de l'accueil de ces personnes.
Notre priorité reste évidemment la reconstruction de l’île. C'est la raison pour laquelle les agents publics resteront sur place. Sauf naturellement s'ils sont eux-mêmes dans une des situations que je viens de décrire, c’est-à-dire une situation personnlle ou familiale qui justifierait leur départ.
Les renforts que j’ai demandés à chaque ministre de préparer permettront d’assurer la continuité de l’Etat et d’offrir le répit nécessaire à ceux qui sont à la fois touchés par l’évènement et à pied d’œuvre pour y faire face.
Un mot sur la situation sanitaire sur les deux îles. Les hôpitaux de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy ont beaucoup souffert du cyclone, des cyclones. Cependant, leurs capacités opérationnelles ont pu rapidement être rétablies, un bloc opératoire et un bloc obstétrique fonctionnent notamment à l'hôpital de Saint-Martin. Ils disposent d’une autonomie en eau et en provisions qui leur permet de fonctionner dans des conditions opérationnelles.
Demain, un centre de soins sous tente de grande capacité sera mis en place dans le stade de Marigot. Il permettra d'accueillir, avec le renfort de médecins libéraux, un très grand nombre d’habitants qui souhaiteraient pouvoir consulter.
Au-delà, le bâtiment de projection et de commandement Tonnerre, qui quittera Toulon demain matin, dispose d'une capacité hospitalière qui est supérieure à celle dont disposait l’hôpital de Saint-Martin avant l’ouragan. Autrement dit, dès l'arrivée du bâtiment Tonnerre, les capacités hospitalières d'accueil seront non seulement largement suffisantes, mais en mesure de traiter la totalité des hypothèses qui pourraient se présenter.
D’ores et déjà, l’acheminement sur place des médicaments est rétabli et garanti. Notre vigilance se porte désormais sur la prévention des maladies tropicales. Deux experts épidémiologistes du ministère de la Santé sont sur place depuis plus de 48 heures pour évaluer précisément les risques et proposer aux préfets, à l'Agence régionale de santé et à la ministre de la Santé, Agnès BUZYN, les mesures nécessaires.
S'agissant de la médecine d'urgence, en plus des cinq médecins prépositionnés avant le déclenchement de l'événement climatique, vingt spécialistes sont désormais sur place et se relaient pour apporter, dans les meilleures conditions, là encore, les soins d’urgence nécessaires.
Sur les questions liées à l'éducation, la rentrée scolaire devait initialement se dérouler lundi dernier. Elle ne peut évidemment être assurée. Sur les 21 écoles ouvertes à Saint-Martin, trois restent entières et encore trois sont endommagées, ce qui veut dire que les 18 autres ne sont plus opérationnelles et devront être reconstruites. C'est la même chose pour les collèges de l’île et c'est la même chose pour une des cités scolaires qui a été terriblement endommagée.
Notre objectif reste néanmoins que la rentrée puisse intervenir le plus vite possible dans le travail de sécurisation et de bâchage des bâtiments publics qui s‘est engagé depuis hier les écoles sont prioritaires. Des tentes gonflables, climatisées, de très grande capacité vont également être déployées. L’objectif est d’assurer la reprise des cours dans des conditions normales à la rentrée des vacances de la Toussaint. Le ministre de l’Education nationale qui se rendra sur place dès ce soir avec le Président de la République indiquera à son retour comment la phase d’accueil transitoire des élèves pourra être assurée dans de bonnes conditions.
La reconstruction doit sans attendre mobiliser toute notre énergie et la réunion d’aujourd’hui a permis d’une part de faire un point de situation avec les grands opérateurs, d’autre part de déterminer plusieurs axes de travail. Ces axes seront approfondis par les experts qui partiront dès ce soir et feront l’objet d’une concertation avec les élus de l’île que le Président de la République rencontrera demain.
Je voudrais à ce point faire un état des lieux s’agissant de la situation des grands réseaux. S'agissant de l'eau potable, vous savez qu’il n'y a pas de source d'eau potable sur les deux îles et que c'est donc par un procédé de désalinisation que la population pouvait accéder à l’eau potable. Les usines de production d’eau potable ont été endommagées, les citernes qui permettent de stocker l'eau potable ont été endommagées et les réseaux de distribution qui permettent de distribuer cette eau ont eux aussi été endommagés.
Pour garantir l’approvisionnement en eau, à très court terme c'est par la distribution de bouteilles d'eau potable que sera garanti l'accès à l'eau. Elles sont en nombre suffisant sur l’île et elles vont continuer à être acheminées de façon à pouvoir permettre sur l’ensemble des points du territoire une distribution dans des conditions satisfaisantes. J'ajoute sur ce point, et je parle sous le contrôle de monsieur le ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur, que si dans les premières heures après l’événement climatique la distribution était centralisée dans un point puis deux de l’île, elle est aujourd’hui décentralisée et il est beaucoup plus facile d'apporter y compris dans les quartiers les plus éloignés les bouteilles nécessaires.
Dans un deuxième temps, les usines, notamment l'usine de Saint-Martin pourra être réparée et sera complétée dans sa production par une usine mobile de désalinisation qui sera transportée depuis Madrid jusqu'à l'île de Saint-Martin. Dans une phase intermédiaire, la distribution d'eau potable devrait être garantie par des citernes placées en accord avec les pouvoirs publics et opérées dans des modalités qui seront précisées ultérieurement, l’objectif est de faire en sorte que ces citernes soient positionnées sur des points de l’île qui soient accessibles mais que la distribution de l'eau ne donne pas lieu à des désordres et notamment à des violences ou à des brutalités. La première estimation qui nous est possible de donner sur un retour à la normale s'agissant de la distribution d'eau laisse à penser qu'il faudra au moins trois mois pour reconstruire et remettre en ordre les systèmes de distribution de façon satisfaisante pour l’ensemble de la population.
S’agissant de l’électricité, après une rupture d'alimentation totale EDF indique que 3 500 clients sont d'ores et déjà réalimentés sur les 24 000 que comptait l’île auparavant. Nous devons faire face à une très grande incertitude s'agissant de l'état des réseaux électriques et la nécessité est évidemment d’abord de faire le point sur leur état pour pouvoir rétablir l'accès prioritaire à ces réseaux. Une cinquantaine de groupes électrogènes de grande capacité sont en route, sont d’ores et déjà acheminés en Guadeloupe et feront l'objet d'un acheminement progressif sur l'île de Saint-Martin et sur l'île de Saint-Barthélemy. Ils ont été transférés samedi dernier par gros porteurs afin de pouvoir être localisés le plus rapidement possible aux endroits nécessaires et appropriés sur les deux îles.
S'agissant des télécommunications, les câbles sous-marins n'ont pas souffert du cyclone, ce qui constitue une bonne nouvelle. En revanche, les réseaux mobiles et les réseaux fixes ont été terriblement dégradés. A Saint-Martin, sur 17 sites, 17 antennes, 17 relais, 16 sont hors service et à Saint-Barthélemy sur 11 sites 10 sont hors service. S’agissant du réseau fixe la quasi-totalité des poteaux sont tombés et deux répartiteurs sur quatre sont hors service. La priorité d’action est évidemment de rétablir le réseau mobile en procédant à l’installation de sites provisoires le plus rapidement possible accompagnée de générateurs, en restaurant le réseau existant et en reconstruisant le moment venu un réseau pérenne.
Un certain nombre d'initiatives ont été prises pour développer des réseaux Wi-Fi locaux en bonne intelligence avec les propriétaires de boxes fonctionnant, il n'y a plus beaucoup de boxes qui fonctionnent, je crois que si je me souviens bien des chiffres on est à 400 boxes sur un total de 10 000 avant l’événement, et là encore il s’agit de trouver la solution pour offrir le plus rapidement et dans les meilleures conditions l’accès au réseau indispensable aux habitants. En deuxième temps, viendra le rétablissement du réseau fixe et là ce sera long car il a été endommagé et les moyens pour le remettre en ordre seront importants.
S'agissant de l'accès au fuel, l'île de Saint-Martin comportait neuf stations-services, trois ont été détruites, cinq ont été endommagées mais sont opérationnelles à compter d'aujourd'hui pour distribuer du carburant dans des limites fixées à 20 litres par personne. Une sera réservée aux services de l'Etat afin de garantir leur caractère opérationnel.
S’agissant des assurances, l'état de catastrophe naturelle a été déclaré samedi, je l’ai indiqué, le délai de 10 jours qui accompagne la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, 10 jours au terme desquels il faut avoir fait sa déclaration pour pouvoir bénéficier d’une indemnisation, ce délai de 10 jours sera levé. Les assureurs nous ont garanti de la plus grande coopération et ils se sont engagés à verser des avances aux sinistrés dès lors qu’ils pourront reprendre contact avec ceux qui en ont besoin mais c'est là un geste qu'il faut saluer.
Au total, ce soir le Président de la République quittera la métropole pour se rendre sur place. Dans son avion seront présents des experts qui procéderont à l'évaluation des dégâts, des experts du logement, un médecin coordonateur pour les urgences médico-psychologiques, expert dans les constructions hospitalières, un expert de l'Education nationale. Ils vont compléter les équipes déjà présentes en matière de télécommunications, d’électricité, d’aviation civile, de santé et de forces de sécurité.
Ils seront coordonnés par un délégué interministériel qui sera nommé dès le prochain conseil des ministres. Ce qui s’est tenu aujourd’hui à Matignon, Mesdames et Messieurs, c’est un comité interministériel, le premier, pour la reconstruction des îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin. Ce comité interministériel a vocation à se réunir la semaine prochaine, en début de semaine pour faire le point sur la situation et pour que soient prises les mesures indispensables à la reconstruction dans de bonnes conditions des infrastructures et des biens auxquels sont légitimement attachés nos concitoyens de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.
J’ai eu l’occasion de le dire plusieurs fois. L’engagement de l’Etat sera en la matière total ; il s’exprimera de façon cohérente globale et durable. Ce que vivent nos concitoyens de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, c’est une série d’événements climatiques jamais vus, jamais enregistrés par leur intensité et jamais connus par la puissance des destructions qu’ils ont engendrés. Dans une telle situation, l’urgence est de répondre aux besoins des populations. La mobilisation des services de l’Etat a permis le rétablissement de l’ordre public, et le début d’une réorganisation des services publics.
Tous ceux qui s’improvisent experts en gestion de crise ou en logistique exceptionnelle pour faire naître des polémiques qui me semblent aussi inutiles que contreproductives ne rendent service ni aux populations locales ni à ceux qui essayent par leur travail, par leur engagement et par la qualité professionnelle dont ils font preuve de leur venir en secours et de leur permettre de revivre plus sereinement. Je voudrais donc à nouveau remercier ceux qui s’engagent dans toutes les spécialités avec toutes les compétences et avec la volonté d’être au service de nos concitoyens ; je voudrais remercier les grands opérateurs de réseaux qui sont présents autour de moi aujourd’hui et indiquer à l’ensemble des membres du gouvernement et à l’ensemble des Français que ce qui se joue à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, ça n’est pas simplement le rétablissement de conditions normales de vie à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, c’est beaucoup plus que cela. C’est la capacité d’une nation, la France, d’être à la hauteur d’un événement qui touche chaque Français. C’est la raison pour laquelle nous sommes tous sensibles aux élans puissants et nombreux de solidarité qui s’expriment chez les collectivités territoriales, dans les associations, chez les particuliers. Ils vont venir utilement compléter l’engagement de l’Etat et Saint-Martin et Saint-Barthélemy en ont besoin !
Je vous remercie beaucoup et nous aurons l’occasion au jour le jour de tenir informé l’ensemble de la population française de l’avancée de cette situation. Merci.

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