Tribune : "Le renouveau du nucléaire en Europe"

Publié 12/04/2024|Modifié 12/04/2024

Dans une tribune publiée dans Le Trombinoscope, le Délégué interministériel au nouveau nucléaire se réjouit du changement de regard porté sur le nucléaire en Europe, notamment grâce aux efforts de l’Alliance du nucléaire créée par la France. S'il appelle de ses vœux une meilleure reconnaissance du rôle de l’énergie nucléaire aux côtés des énergies renouvelables pour atteindre nos objectifs de décarbonation, il souligne l'enjeu pour l’industrie nucléaire française de poursuivre et d'accentuer ses efforts de remontée en capacité et de maîtrise industrielle, gages du succès d’un renouveau nucléaire en Europe.

Le renouveau du nucléaire en Europe

           Le développement de l’énergie nucléaire fait son grand retour en France avec plusieurs projets majeurs : prolongation de la durée de vie des réacteurs du parc existant à 60 ans et au-delà, construction d’au moins 6 nouveaux réacteurs EPR2, dynamique d’innovation avec les petits réacteurs modulaires, et renforcement des installations du cycle du combustible. Cette forte ambition en faveur du « nouveau nucléaire » s’inscrit dans une politique énergétique d’ensemble, qui vise à atteindre la neutralité carbone en 2050, et qui a déjà permis de réduire, en l’espace d’un an, nos émissions nationales de gaz à effet de serre de 4,8% par rapport à leur niveau de 2022[1]. Cette stratégie énergétique française repose sur quatre piliers complémentaires. Les deux premiers reposent sur les efforts de sobriété et d’efficacité énergétique, afin de renforcer notre maîtrise de la demande en énergie. Les deux autres visent à développer un mix électrique robuste afin d’accompagner le mouvement de sortie des énergies fossiles. Pour répondre aux besoins croissants en électricité décarbonée, il s’agit d’une part de renforcer nos capacités nucléaires pour disposer d’une base pilotable, souveraine et compétitive, et, d’autre part, de continuer à développer les énergies renouvelables.
            Retour du nucléaire en Europe, également. Il faut se féliciter du changement de regard porté sur le nucléaire en Europe, dont témoigne l’organisation à Bruxelles d’un premier sommet international sur l’énergie nucléaire les 21 et 22 mars derniers. La France joue un rôle majeur dans cette nouvelle dynamique avec la création d’une Alliance du nucléaire début 2023. Celle-ci rassemble à ce jour une quinzaine d’Etats européens et s’est encore récemment réunie, le 6 mars dernier. Avec les membres de cette alliance, nous attendons de l’Union européenne une meilleure reconnaissance du rôle de l’énergie nucléaire aux côtés des énergies renouvelables pour atteindre nos objectifs de décarbonation. Cette demande d’une approche technologiquement neutre a récemment trouvé une première traduction dans le compromis obtenu le 6 février dernier pour le règlement pour une industrie « zéro émission nette ». Dans sa dernière version, celui-ci prévoit désormais que les technologies nucléaires bénéficient des mêmes avantages que ceux initialement offerts aux seules énergies renouvelables. Il faut également saluer le projet d’une alliance industrielle dédiée aux projets de petits réacteurs modulaires (SMR) et réacteurs modulaires avancés (AMR), dont la contribution aux efforts de décarbonation pourrait être précieuse.
            Dans ce contexte favorable, porté par un soutien croissant des opinions publiques, en particulier chez les jeunes générations, les attentes sont fortes à l’égard de l’industrie nucléaire française et européenne. Le défi principal est de reconstituer un système industriel performant pour mener à bien ces projets, dans les coûts et dans les délais. A ce titre, la position de la France est singulière puisqu’elle est à la fois pourvoyeuse de technologies, qu’elle bénéficie d’une chaîne d’approvisionnement complète ainsi que d’un opérateur en charge de construire des réacteurs dans le cadre d’une approche programmatique (au moins 3 paires d’EPR2). La réussite de la filière française dans son effort de remontée en capacité et de maîtrise industrielle est donc déterminante et prioritaire pour le succès d’un renouveau nucléaire en Europe.  
Joël Barre, Délégué interministériel au nouveau nucléaire
[1] Les émissions nationales de gaz à effet de serre ont ainsi diminué de près de 30% par rapport à 1990, pour un objectif de – 55% en 2030.
Tribune publiée dans La revue du Trombinoscope, Avril 2024

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