Publié 26/02/2024|Modifié 01/02/2024

Pierre Bérégovoy

Ouvrier, autodidacte, Pierre Bérégovoy est nommé Premier ministre en avril 1992 par le président de la République François Mitterrand, en remplacement d’Édith Cresson. Il conserve son poste jusqu’en mars 1993. Il met fin à ses jours le 1er mai 1993.

Portrait de Pierre Bérégovoy à Matignon
Portrait de Pierre Bérégovoy à Matignon / AFP

Le monde a changé de dimension : la solitude des nations n’est que le vertige de l’impuissance ; c’est dans la solidarité des ensembles que s’exprime l’autorité sur la scène internationale. L’histoire nous l’enseigne, la France, ce n’est pas seulement un sol. C’est aussi, c’est surtout, pour ceux qui y sont nés et pour ceux qui l’ont choisie, un esprit, capable de persister dans un espace plus vaste. Notre patriotisme ne se réfugie pas dans le passé. Il voit plus loin. Ce n'est pas un patriotisme de position, mais un patriotisme de mouvement, non pas un patriotisme de repli, mais un patriotisme d'ouverture. J'allais dire : non pas un patriotisme nostalgique mais un patriotisme prophétique. Que devons-nous faire ? Susciter, nous aussi, un espace à la dimension du monde nouveau. Cet espace, c’est l’Union européenne. Le président de la République l'a dit : la France est notre patrie, l'Europe est son avenir.

Pierre Bérégovoy

Copié !

BIOGRAPHIE

  • Né le 23 décembre 1925 à Déville-lès-Rouen (Seine-Maritime)
  • Profession : cadre à la SNCF
  • Parti politique : Parti socialiste
  • Premier ministre d'avril 1992 à mars 1993
  • Décédé le 1er mai 1993
Fils d’un immigré ukrainien commerçant, Pierre Bérégovoy est titulaire d’un brevet d'enseignement industriel, d’un CAP d’ajusteur et d’un CAP de dessinateur industriel.
Ouvrier fraiseur puis cadre à la SNCF, il s'engage en 1943 dans la Résistance puis dans les Forces françaises de l'intérieur. A la Libération, il est membre de la SFIO et de la CGT. Au sein de la SFIO, il s’oppose aux guerres coloniales. À la scission de la CGT, il choisit de rejoindre Force ouvrière.
En 1949, il entre au cabinet de Christian Pineau, ministre des Travaux publics et des Transports dans le gouvernement Henri Queuille, en tant que chargé des relations avec les syndicats.
Il participe à la fondation du Parti socialiste autonome (1958) puis du Parti socialiste unifié (1960). Il y rencontre Pierre Mendès-France dont il devient un proche collaborateur. Il rejoint le nouveau Parti socialiste dès 1969.Après l'élection de François Mitterrand en 1981, il est nommé secrétaire général de la présidence de la République. Il participe au choix d’une réduction du temps de travail de 40 à 39 heures sans perte de salaire.
Il devient ensuite ministre des Affaires sociales et de la Solidarité nationale dans le gouvernement Mauroy, de juin 1982 à juillet 1984. En 1983, il est de ceux qui plaident auprès du président de la République pour que la France sorte du système monétaire européen. En 1983, il est élu maire de Nevers.
Dans le gouvernement de Laurent Fabius, il occupe les fonctions de ministre de l'Économie, des Finances et du Budget de juillet 1984 à mars 1986.Il est élu député de la Nièvre aux élections législatives de mars 1986, François Mitterrand lui léguant ainsi son fief.
Directeur de campagne de François Mitterrand à l’élection présidentielle de mai 1988, il devient, après la victoire de ce dernier, ministre d'État, ministre de l'Économie, des Finances et du Budget dans le gouvernement Rocard (juin 1988 à mai 1991).
Dans le gouvernement d’Édith Cresson, il conserve le même portefeuille, secondé par des ministres délégués (mai 1991 à avril 1992).

PIERRE BÉRÉGOVOY À MATIGNON

Suite aux élections cantonales et régionales de 1992, il est nommé Premier ministre en avril.
Après les controverses autour d’Edith Cresson, François Mitterrand fait un choix qui rassure. Il est vrai que, déjà, le nom de Pierre Bérégovoy avait été évoqué comme une possibilité pour Matignon en 1983, 1984, 1988 et 1991.
Pierre Bérégovoy paraît un homme de la synthèse : il a des origines modestes, il est aussi l’homme du franc fort et de la rigueur budgétaire

Discours de politique générale, 8 avril 1992

Pierre Bérégovoy présente son gouvernement devant l’Assemblée nationale moins d’un an avant le renouvellement des députés. Son objectif est de restaurer la confiance et de renouer avec l’espérance, par l’action. Son gouvernement travaillera « pour la France et les Français ». Dans un contexte économique difficile, le Premier ministre fait le choix de la rigueur. Mais il rappelle qu’il « ne faut pas confondre rigueur économique et rigueur sociale ». Si la rigueur en économie est une exigence de bonne gestion, la justice sociale est au centre des préoccupations du gouvernement. Il n’y a pas de remèdes miracles, mais il y a « la lucidité, le calme et la persévérance »
Enfin, à moins de six mois du référendum pour la ratification de traité de Maastricht, Pierre Bérégovoy rappelle que l’Europe est la priorité du président Mitterrand, et un facteur essentiel de paix et de progrès. Il veut « faire l’Europe sans défaire la France ».

Action contre le chômage et la corruption

Contraint par la perspective des élections législatives de 1993, Pierre Bérégovoy se fixe deux grands objectifs : l'action contre le chômage et contre la corruption.
Sur le premier point, il promet que les 900 000 chômeurs de longue durée se verront offrir d’ici à la fin de l’année 1992 un emploi, une formation ou une occupation d’intérêt général. Mais, au second trimestre 1992, la France entre en récession. Début 1993, le cap des trois millions de chômeurs est atteint.
Sur le second point, celui de l'action contre la corruption, une série de mesures doit permettre d’instaurer la transparence sur les dons des entreprises aux partis politiques. Mais des maladresses de communication, l’enchaînement d’affaires, nuisent à cet effort. En février 1993, l’affaire du prêt sans intérêt d’un million de francs que Pierre Bérégovoy a perçu de l’homme d’affaires Roger-Patrice Pelat le blesse profondément. Pierre Bérégovoy a déclaré le prêt à l’administration fiscale et s’est conduit dans les règles, mais le Premier ministre se défend mal, débordé par la polémique qui met à mal son image.
Arrivé dans un contexte économique difficile, il prend diverses mesures sociales au travers de la loi relative à l'action contre la pauvreté et l'exclusion sociale et professionnelle (accès à une fourniture minimum d'eau et d'énergie, aide médicale, etc.). Il instaure le Conseil national des politiques contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Il fait également voter une loi sur l'élimination des déchets et la protection de l'environnement.
L'opposition remporte les législatives de mars 1993 mais Pierre Bérégovoy retrouve son siège de député de la Nièvre.

Le dernier hommage de la République à l’un des siens

Profondément blessé par les mises en cause de son honneur, Pierre Bérégovoy met fin à ses jours le 1er mai 1993, à l'âge de 68 ans.
« Toutes les explications du monde ne justifieront pas qu'on ait pu livrer aux chiens l'honneur d'un homme et finalement sa vie », déclare le président Mitterrand, la voix nouée, devant le cercueil de Pierre Bérégovoy, le 4 mai 1993 à Nevers. Plusieurs milliers de citoyens se sont rassemblés. Sont également présents, le président Giscard d’Estaing, les anciens Premiers ministres, une grande partie du nouveau gouvernement, les présidents des assemblées. Laurent Fabius souffle « Il y a des mots qui peuvent tuer - je pense à Roger Salengro » et précise que Pierre Bérégovoy fut « un grand ministre de l’Économie et des Finances et un remarquable Premier ministre ».
Pour Valéry Giscard d’Estaing, l’ancien Premier ministre a exercé ses fonctions « avec dignité et avec simplicité ». Édouard Balladur, nouveau Premier ministre, se reconnaît
« profondément bouleversé par la disparition tragique » d’un homme « d’un grand mérite et d’un grand courage qui s’était, pendant de longues années, attaché à servir du mieux possible les intérêts de notre pays ». L’ancien Premier ministre Raymond Barre déclare que Pierre Bérégovoy était un homme de courage et de responsabilité : « Courageux parce que, compte tenu de son équation personnelle, il a été amené à prendre des décisions qui devaient nécessairement susciter des réactions chez ceux dont il était le plus proche. Responsable parce qu’il mesurait la nécessité, sur le plan national et international, de prendre des mesures douloureuses et rigoureuses ».

LES PRINCIPALES LOIS DE PIERRE BÉRÉGOVOY