
Projet de loi Travail : pourquoi il faut réformer
Avec les mesures de soutien à l’emploi, dont le CICE et le Pacte de responsabilité, la France a connu en 2015 une croissance de 1,1 % quand l’emploi marchand a augmenté de 80 000 salariés. C’est encore trop peu pour enrayer le chômage de masse. Le Gouvernement a décidé la réforme du code du travail pour augmenter la croissance et accroître l’emploi, en activant trois leviers d’action : se former tout au long de la vie professionnelle pour développer ses compétences et faciliter la mobilité professionnelle, renforcer le dialogue social dans les entreprises et favoriser l’embauche en CDI.
Se former tout au long de la vie professionnelle
La formation professionnelle est un droit qui permet de préparer au mieux son projet professionnel à l’heure où les parcours sont faits de ruptures, de reconversions, de mutations, ou d’envie d’entreprendre : on passe d’un emploi à un autre, d’un statut à un autre et, parfois même, on cumule une activité salariée et une activité indépendante.
Aujourd’hui, l’accès à la formation professionnelle est trop faible en France, en comparaison avec nos voisins européens : 40 % seulement des salariés ont accès à la formation. De plus, seulement 11 % de ces formations sont réellement qualifiantes.
Le projet de loi vise à faciliter la mobilité professionnelle et le développement des compétences tout au long du parcours professionnel pour sécuriser les parcours et à faciliter les transitions professionnelles. Pour ce faire, il instaure un compte personnel d’activité (CPA).
Rendre la formation plus égalitaire
Le projet de loi vise à rétablir l’égalité en matière d’accès à la formation.
En effet, la formation profite davantage aux ingénieurs et cadres (56 %) qu’aux ouvriers (32 %). Dans les grandes entreprises, le taux d’accès à la formation des ingénieurs dépasse les 67 %. Dans les entreprises de moins de 20 salariés, il est de 12 %.
Augmenter la formation des demandeurs d’emploi
Le projet de loi vise à former davantage les chômeurs.
56 % des demandeurs d’emploi ont un diplôme inférieur au bac. La formation des demandeurs d’emploi est un donc un facteur clé, d’autant que de nombreux secteurs d’activités éprouvent des difficultés de recrutement : services à la personne, commerce, industrie, santé … En 2015, seulement 10 % des demandeurs d’emploi ont bénéficié d’une formation (deux fois moins qu’en Allemagne).
Renforcer le dialogue social en entreprise
Le Gouvernement a profondément encouragé le dialogue social depuis 2012. Il souhaite aller encore plus loin pour construire une démocratie sociale à la hauteur des enjeux de notre pays, à l'instar de l’Allemagne ou des pays du nord de l’Europe. La négociation collective - c’est-à-dire la régulation par les partenaires sociaux, au plus près du terrain - permet de concilier un haut niveau de protection des salariés avec l’exigence de performance économique.
Le projet de loi vise à améliorer le dialogue social en entreprise en donnant une place centrale à la négociation collective.
Bien que quelque 36 000 accords d'entreprise soient signés chaque année, le dialogue social en entreprise a trop peu de marges de manoeuvre. Comme l'a souligné le rapport de Jean-Denis Combrexelle, il existe encore plusieurs freins :
- pour les employeurs, la négociation est davantage perçue comme une contrainte et un coût plutôt que comme un levier de performance ;
- les partenaires sociaux (syndicats et patrons) manquent d'une culture commune et de formation pour négocier.
Conséquence : les accords sont souvent formels et la pluplart ne sont pas révisés et deviennent obsolètes. Faute d'un vrai dialogue paritaire, des enjeux importants comme la préservation ou le développement de l'emploi ou les conditions de travail ne sont pas ou peu traités à leur juste mesure.
Favoriser l'embauche en CDI
Pour les nouveaux entrants dans le monde du travail, les contrats intérimaires et le CDD sont devenus la règle et le CDI l'exception.
Le projet de loi vise à redonner confiance aux salariés et à lever les freins à l'embauche en CDI.
Des CDD de plus en plus précaires
La durée des CDD est de plus en plus courte : 30 % des CDD ont une durée inférieure à 3 mois (19 % en Italie et seulement 4 % en Allemagne). De plus, les jeunes, mêmes diplômés, enchaînent stages et CDD et n'entrevoient pas de signature de CDI après plusieurs années. Ainsi, un tiers des jeunes disposant de diplômes d'études supérieures ne bénéficient toujours pas de CDI trois ans après la fin de leurs études.
Pour le Gouvernement, les protections que le code du travail apporte aux Français ont perdu de leur efficacité. C'est en France que les salariés ont le plus peur pour leur avenir. En ouvrant la possibilité d'obtenir plus de CDI, le Gouvernement vise à redonner confiance aux salariés.
Redonner confiance aux entreprises
Beaucoup de TPE/PME hésitent à recruter en CDI car la législation actuelle est floue quant aux conséquences financières en cas de licenciement. Concrètement, le code du travail ne permet pas aujourd’hui à une entreprise, qui subit des pertes depuis plus d’un an, de savoir si elle peut procéder à des licenciements économiques. Les contentieux sont nombreux, engageant des procédures prud'homales longues et incertaines. Les jugements rendus révèlent aujourd’hui de très grandes disparités : les indemnités peuvent varier dans des rapports de 1 à 7 pour des salariés de deux ans d’ancienneté. Cette hétérogénéité pèse aussi sur les salariés souvent engagés dans des contentieux longs et incertains.
Le projet de loi du Gouvernement vise à clarifier ce point en instaurant un barème indicatif pour les indemnités prud'homales. Ce référentiel national sur lequel peut s'appuyer le juge, doit permettre de donner plus de prévisibilité aux employeurs en permettant d'apprécier le risque financier lié à la rupture du contrat. Embaucher en CDI pour un patron de TPE/PME est un acte fort. En encourageant l'embauche en CDI, ce barème est aussi un outil contre les contrats précaires au profit des salariés.