300 ans des brigades de la Gendarmerie nationale

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Jean Castex.

Publié 03/04/2021

Monsieur le ministre de l’Intérieur, cher Gérald,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Monsieur le président du conseil départemental,
Madame la maire de Saint Astier,
Monsieur le président de la communauté de communes,
Mesdames et messieurs les élus,
Monsieur le DGGN, mon général, cher Christian Rodriguez,
Mesdames et messieurs les officiers généraux, officiers supérieurs, sous-officiers et gradés de la gendarmerie nationale,
Mesdames et messieurs,
Comment vous le cacher ? Je suis particulièrement heureux de pouvoir m’exprimer devant vous ce matin. Permettez-moi d’exprimer d’abord la fierté qui est la mienne d’être là, avec le Ministre de l’Intérieur. Fier en ma qualité de Premier ministre de célébrer une arme prestigieuse, d’honorer un pilier de notre sécurité nationale, un fleuron de l’engagement républicain et de saluer un maillon essentiel de la France des territoires.
Depuis trois siècles, dans les campagnes françaises, l’uniforme du Gendarme, quelle qu’ait été son aspect, garantit l’ordre parce qu’il rappelle à tous que la première fonction de l’Etat, c’est de protéger les citoyens.
Fierté aussi de l’ancien maire d’une commune en zone de gendarmerie. En effet, mes douze ans de mandat à Prades, où siège l’une de vos compagnies, ce sont douze ans de coopération avec les gendarmes, douze ans de complicité, douze ans de valeurs partagées au services de nos concitoyens. Douze ans de vécu des questions de sécurité, un vécu humain, un vécu concret, un vécu quotidien.
Au fond, dans un pays comme la France, la mairie, l’école, la gendarmerie représentent les trois socles républicains : la vie publique, l’éducation et la sécurité. C’est, j’en suis convaincu, sur cette base que repose depuis maintenant plus d’un siècle et demi, l’attachement des Français à la République et plus au-delà, l’Etat qui a fait la France.
Cette France, la Gendarmerie la sert jusqu’au sacrifice.
Depuis 2017, 15 gendarmes ont perdu la vie au cours d’une mission, dont 4 depuis mon entrée en fonction, et plus de 16.000 ont été blessés en faisant leur métier. Ces chiffres sont terribles, car ils montrent à quel point vous êtes exposés au danger. Je veux leur rendre, ici, hommage. Comme je veux penser avec vous à la mort héroïque d’Arnaud BELTRAME à Trèbes, il y a trois ans de cela, qui nous rappelle l’engagement constant de la Gendarmerie dans l'action contre la menace terroriste qui reste d’une terrible acuité.
Ces drames doivent rappeler à tous nos concitoyens que leur tranquillité, leur sûreté, ils la doivent à votre engagement, jusqu’au prix de votre vie. Et que dire de ces nouvelles menaces chargées de dangers mortifères comme ces adeptes du survivalisme dont l’un d’entre eux a abattu de sang-froid trois de vos frères d’arme de la compagnie d’Ambert, dans le Puy-de-Dôme, dans la nuit du 22 au 23 décembre dernier. Je conserve aujourd’hui encore un souvenir ému de ma conversation dès le lendemain de ce drame avec leur chef direct présent au moment des faits.
Cet engagement il ne date pas d’hier, puisque je suis venu célébrer ici le 300ème anniversaire de la création des brigades de gendarmerie. C’est en effet il y a 3 siècles, sous la Régence de Philippe d’Orléans, que son secrétaire d’Etat à la guerre, Claude LE BLANC a réformé l’ancienne maréchaussée en lui confiant des compétences de police à travers toute la France. Claude LE BLANC à qui l’on doit aussi d’avoir inventé l’ancêtre de nos attestations de déplacement en temps d’épidémie.
Vous êtes les héritiers directs de cette longue histoire, car ce modèle n’a jamais été contesté. Bien au contraire, la République, dès 1791, en créant la Gendarmerie nationale, confirmait l’intuition de Claude LE BLANC en lui assignant désormais une mission citoyenne.
Aujourd’hui, parce que la société a changé, parce que le monde évolue, parce que nous devons affronter des crises permanentes et protéiformes, les Français attendent toujours beaucoup de vous. Pour autant, c’est par l’héritage de cette longue histoire et à votre forte identité dans l’esprit de nos concitoyens, que vous vous montrez à la hauteur de vos grandes missions.
Depuis un an, le monde, l’Europe, la France sont mis à l’épreuve d’une épidémie historique. Le pays affronte désormais une troisième vague d’une gravité particulière. Dans ce contexte, je veux saluer la mobilisation sans faille de la gendarmerie.
Dès le premier confinement, il y a un an, vous avez donné tout son sens à cette notion de « service public de proximité » qui est au centre de votre mission, vous avez « répondu présent ». Malgré les difficultés logistiques, vous avez dû protéger et accompagner la population. Parfois, vous avez même été le seul lien entre la République et les citoyens les plus fragiles, les plus précaires et les plus isolés. Vous faites respecter des règles sanitaires et des gestes barrières auxquels certains par imprudence, par inconséquence ou par irresponsabilité, refusent de se plier. Je sais que vous le faites avec discernement, avec humanité mais aussi avec fermeté car vous savez que ces gestes protègent nos concitoyens.
Les prochaines semaines vont exiger de vous une mobilisation renouvelée, alors même que, comme pour le personnel hospitalier, la fatigue gagne vos rangs. J’en ai parfaitement conscience. Je suis là pour vous encourager et vous soutenir.
Au-delà du respect des règles sanitaires qui s’étendent désormais à l’ensemble du territoire, l’Etat compte sur votre implication dans la réussite de la campagne vaccinale. Depuis le début de l’année, 211 escortes de vaccins ont été réalisées par la gendarmerie et 11 sites de stockage sont sous votre surveillance. Et puisque la célébration de ce jour nous tourne vers l’histoire, celle-ci nous rappelle que c’est déjà la Gendarmerie qui, au moment de la Première Guerre mondiale, encadrait les premières campagnes de vaccination massive, et ce jusqu’à Salonique. Et, c’est encore la Gendarmerie, qui était chargée de veiller aux premières mesures sanitaires opposées à l’épidémie de la grippe espagnole, il y a un siècle.
Pour autant, la crise sanitaire n’a pas diminué l’importance de vos autres missions. Votre mission première, c’est d’assurer la protection de nos concitoyens. Et pour la Gendarmerie, leur sécurité au quotidien face à une violence endémique.
Cette violence, vous la combattez avec détermination. Elle a pris de nouvelles dimensions et ne se cantonne plus aux grandes agglomérations. Elle s’est répandue dans les petites villes, dans les zones périurbaines et jusque dans nos campagnes. Permettez-moi d’insister sur le trafic de stupéfiant car cette gangrène autrefois limitée à certains quartiers urbains, est en train de gagner la totalité de nos territoires. Il y a, vous le savez une priorité majeure de notre politique de sécurité publique, sous l’autorité ferme et avisée de notre ministre de l’Intérieur.
Et les résultats sont là : pour cette seule semaine, ce ne sont pas moins de 13 affaires traitées, avec 66 gardes-à-vue, plus de 230.000 Euros d’argent sale saisis, ainsi que 10 véhicules et 15 armes à feu. La violence de la réaction des trafiquants qui a redoublée en début de l’année apporte la preuve que votre action déstabilise leur action. Il faut continuer à les frapper. C’est toute la chaîne de la drogue qui doit être attaquée, du petit consommateur au grand trafiquant, car tous participent à cette de violence endémique. Et je me félicite de l’utilité que vous trouvez à l'amende forfaitaire délictuelle, instaurée dès ma prise de fonction. Plus de 14.000 amendes ont été dressées par les gendarmes depuis leur mise en place. C’est près d’un tiers du total des verbalisations. Cette amende sera étendue à d’autres situations délictuelles, notamment l'installation illégale de gens du voyage, qui va perturber la vie quotidienne des villages les plus paisibles.
Que ce soit aux frontières, sur la route, en montagne ou sur les mers, au pied des immeubles ou dans l’espace numérique, dans la répression des violences intrafamiliales ou conjugales, l’Etat compte sur vous et je compte sur vous comme l’immense majorité de la population française. Là encore, vous agissez, en lien avec les polices nationale et municipale, mais aussi dans un esprit de coopération affirmé avec les élus des collectivités pour agir contre ces phénomènes de violence qui sont intolérables.
Et l’Etat qui compte sur vous a pour premier devoir de vous donner les moyens nécessaires à l’accomplissement de vos missions. Cette adéquation entre les missions et les moyens, elle se trouve être au centre du Beauvau de la sécurité, lancé à l’initiative du Président de la République. J’ai moi-même ouvert au début du mois de février dernier cette concertation très large sur une base territorialisée. Le principal objectif de ce vaste chantier, conduit sous la houlette du ministre, au-delà des propositions opérationnelles que j’attends de vous, est bien de donner à la sécurité de notre pays des perspectives nouvelles.
Et le Gouvernement tient et tiendra tous les engagements qu’il a pris vis-à-vis de vous. C’est aussi ce que je suis venu vous dire aujourd’hui.
D’abord, des moyens en effectifs. Sur les 10.000 forces de sécurité intérieure supplémentaires créés au cours de ce quinquennat, 2500 postes seront attribués à la gendarmerie d’ici 2022. 1700 ont déjà été affectés et 500 nouveaux gendarmes rejoindront vos rangs cette année.
Les gendarmes, sur la proposition convaincante de votre ministre, n’ont pas été oubliés par le plan de relance que j’ai présenté au mois de septembre dernier. Celui-ci va non seulement permettre la rénovation de vos bâtiments, mais également un meilleur équipement technique de vos brigades, y compris avec des innovations numériques. Il contribuera directement à l’amélioration de vos conditions de vie, de travail et à votre efficacité. 30% de vos logements seront ainsi rénovés d’ici 4 ans. Vos casernes seront également mieux sécurisées et leur confort amélioré : 137 millions d’euros d’investissement supplémentaire seront affectés à leur rénovation thermique.
Plus d’un quart des véhicules de la gendarmerie sera renouvelé d’ici la fin de l’année, et des moyens d’intervention supplémentaires – hélicoptères, bateaux et véhicules blindés –seront également mis à votre disposition.
Et je ne saurais omettre l’essentiel : l’investissement dans votre propre sécurité, priorité depuis le début de ce quinquennat : 84 millions d’euros, c’est une somme sans précédent, ont été consacrés à votre matériel de protection. Autre investissement majeur dans lequel la gendarmerie s’est lancée avec vigueur : le défi numérique. On peut puiser ses traditions dans la belle histoire de France tout en étant à la pointe de la modernité et de l’innovation. Il est vrai que si la violence se manifeste sous de nouvelles formes, il en va de même pour la délinquance technologique. La cybercriminalité est devenue une préoccupation majeure. La gendarmerie est à l’avant-garde dans ce combat et les résultats sont là, notamment contre les cyberattaques qui menacent au quotidien nos administrations et nos entreprises. Nous savons que derrière ces cyberattaques se cachent souvent la grande criminalité ou le terrorisme. Trois siècles après la création des brigades de gendarmerie qui virent l’instauration de méthodes révolutionnaires pour l’époque comme l’obligation de rédiger un rapport après chaque intervention ou encore la transparence dans les recrutements et les promotions, vous êtes toujours en pointe de l’innovation.
Comme l’illustre la généralisation des tablettes numériques qui permettent désormais aux gendarmes de se déplacer au plus près des citoyens et de leurs plaintes.
Et que dire de cette remarquable expérimentation que constitue le Dispositif de Consultation et d’Amélioration du Service, lancé en janvier dans 21 départements et pour 6 mois, sinon qu’il va constituer une petite révolution au sein des forces de l’ordre. En effet, pour la première fois, le partage des données et une cartographie en temps réel de la délinquance vont permettre à toutes les forces de l’ordre de mieux s’adapter à l’insécurité et de prendre une longueur d’avance sur les auteurs de violence et d’incivilité. Là encore ces innovations n’ont qu’un but : mieux protéger la population.
Ces outils innovants permettent une meilleure organisation des services et donc un renforcement de votre présence sur le terrain. C’est là, mon général [le DGGN], le sens de la stratégie Gend 20.24 que vous portez et que vous venez de me présenter.
Mais cette gendarmerie moderne aux couleurs de la France ne serait rien sans des femmes et des hommes bien formés, bien encadrés et bien commandés. Voilà pourquoi je tenais aussi à venir aujourd’hui au Centre d’entraînement de Saint-Astier. L’enjeu de la formation des professionnels que vous êtes, et notamment des cadres de l’Institution, est absolument fondamental.
Si vous incarnez depuis trois siècles une force publique irréprochable et bien préparée à ses missions difficiles pour agir au contact de la population avec le recul, l’humanité, la lucidité, l’éthique et la maîtrise de la force nécessaire, c’est bien par la formation que vous recevez.
Je sais combien votre mission est exigeante, et à cet égard je veux rendre un hommage particulier à la gendarmerie mobile qui incarne une expertise reconnue dans le maintien de l’ordre public. La gendarmerie mobile qui célèbre cette année son centenaire, et dont la mission est plus nécessaire que jamais pour maintenir le bon ordre public indispensable à la vie démocratique.
Mesdames et messieurs, la Gendarmerie a su rester fidèle à ce qui fait depuis trois siècles votre identité. C’est-à-dire d’abord sa proximité avec la population, avec un maillage extrêmement serré sur l’ensemble de notre territoire. Il n’existe pas de territoires abandonnés de la République, là où il existe une gendarmerie. Car vous êtes non seulement une force, mais la vitrine de la République.
Cette proximité, elle traduit un équilibre subtile fait de présence, d’écoute, et de bienveillance mais aussi de fermeté, d’autorité et d’ordre démocratique sans lequel aucune liberté n’est en réalité possible.
Depuis trois siècles, vous protégez les Français, vous les avez protégés contre les dangers ou des criminalités aujourd’hui disparus, mais par votre effort de modernisation, votre mobilisation permanente, vous les protégez aujourd’hui contre des risques, des dangers et des criminalités d’un nouveau genre.
C’est cette permanence d’une mission dans le cadre d’une société qui ne cesse d’évoluer qui fait l’honneur de la Gendarmerie, qui fait la sauvegarde de la République et la grandeur de la France.

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