Conférence de presse du Premier ministre du 18 mars 2019

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Édouard Philippe.

Publié 18/03/2019

Conférence de presse de M. Édouard PHILIPPE, Premier ministre
Hôtel de Matignon
Lundi 18 mars 2019
Seul le prononcé fait foi
Mesdames, Messieurs,
Les événements survenus à Paris samedi dernier, en particulier sur les Champs Elysées, sont intolérables et le président de la République a demandé au Gouvernement d’apporter une réponse à la hauteur des enjeux.
Permettez-moi un court rappel des faits. Après les événements du 1 er décembre, le Gouvernement a mis au point une nouvelle stratégie de maintien de l’ordre pour s’adapter à l’évolution et à la radicalisation des manifestations.
Cette stratégie a permis d’obtenir des résultats, dès le 8 décembre et les semaines qui ont suivi. Toutefois, l’analyse en profondeur des événements survenus à Paris samedi dernier montre que cette stratégie n’a pas été correctement exécutée et que la conduite des opérations a connu des dysfonctionnements dans certains quartiers.
Les polémiques sur l’usage des lanceurs de balle de défense ont conduit à ce que des consignes inappropriées soient passées pour réduire leur usage. La mobilité et la réactivité des forces de l’ordre, leur orientation vers l’interception, très utiles en décembre, ont manqué dans la conduite des opérations.
Les policiers et les gendarmes que j’ai rencontrés me l’ont pourtant dit : il ne s’agissait pas de manifestants, mais d’émeutiers, se regroupant sous forme de black-blocs, dont l’unique intention était de piller, d’incendier, de détruire, de blesser. En incendiant des bâtiments, ils ont pris le risque de tuer.
Ces actes sont des actes criminels. La réponse du Gouvernement doit donc être forte.
Nous allons d’abord renforcer la fermeté de notre doctrine de maintien de l’ordre. Nous voulons, bien entendu, continuer de protéger le droit de manifester. Samedi, 145 000 personnes en France, dont 36 000 à Paris, ont manifesté pacifiquement pour le climat. Et nous voulons évidemment qu’il en demeure ainsi. Comme aujourd’hui, lorsqu’une manifestation sera régulièrement déclarée et pacifique, les forces de l’ordre l’accompagneront, en liaison avec le service d’ordre des organisateurs. Il n’y aura s’agissant de ces manifestations rien de changé.
En revanche, nous mettrons en œuvre une stratégie renforcée de lutte contre les militants des mouvances ultra. Dès samedi prochain, et chaque fois qu’il le faudra, nous interdirons les manifestations se revendiquant des « gilets jaunes » dans les quartiers qui ont été les plus touchés, dès lors que nous aurons connaissance de la présence d’éléments ultra et de leur volonté de casser : je pense aux Champs-Elysées à Paris, à la place Pey-Berland à Bordeaux, à la place du Capitole à Toulouse. Cela se fera naturellement en concertation avec les maires concernés. Je recevrai demain Anne Hidalgo, la maire de Paris et le ministre de l’Intérieur recevra demain Jean-Luc MOUDENC, le maire de Toulouse. Dans ce cadre, nous procéderons à la dispersion immédiate de tous les attroupements.
Pour obtenir l’efficacité sur le terrain que nous n’avons pas obtenue samedi, j’ai demandé à ce que le maintien de l’ordre soit réorganisé :
  • En accordant une plus grande autonomie aux forces sur le terrain qui doivent être, à Paris, placées sous un commandement unifié et doté d’une large capacité d’initiative ;
  • En transformant les détachements d’action rapide en « unités anticasseurs », dotés d’une capacité de dispersion et d’interpellation, pouvant être engagées dès les premiers troubles ;
  • En recourant à des moyens nouveaux : drones, produits marquants, utilisation des moyens vidéo à des fins de manœuvre et de judiciarisation ;
  • En améliorant la manœuvre judiciaire en plaçant plus d’officiers de police judiciaire au plus près des unités de terrain et nous mobiliserons plus de moyens de transports pour regrouper les personnes interpellées.
Nous sommes déterminés à utiliser tous les moyens juridiques disponibles. Dès sa promulgation, la loi visant à protéger le droit de manifester permettra de renforcer les contrôles aux abords des manifestations, de prononcer des interdictions de manifester à l’encontre des éléments les plus violents, de placer en garde à vue et de poursuivre les personnes qui dissimulent leur visage. Chacun peut aujourd’hui mesurer l’utilité des dispositions que le Parlement a adoptées. J’ai demandé à ce qu’elles soient immédiatement mises en œuvre dès l’entrée en vigueur de la loi.
Je ne confonds pas les casseurs et la très grande majorité des gilets jaunes. Mais j’ai eu l’occasion de le dire : lorsqu’une manifestation est non déclarée, interdite, qu’elle est organisée pour casser, tous ceux qui participent, qui de facto protègent les casseurs, qui les encouragent ou les glorifient sur les réseaux sociaux, se rendent complices. Ils devront prendre leurs responsabilités. Nous avons organisé le plus grand débat que ce pays ait connu. Ce n’est pas un hasard si les casseurs se remobilisent alors que le débat est un succès. Ce que veulent ces gens, ce n’est pas le dialogue. Leur seule revendication c’est la violence. Les manifestants pacifiques doivent prendre leur distance avec ces casseurs.
J’ai demandé à la Garde des Sceaux d’augmenter le montant de la contravention encourue en cas de participation à une manifestation interdite. Un certain « nombre de personnalités » ont encouragé et légitimé les violences, et continuent à le faire sans vergogne. J’ai demandé au ministre de l’Intérieur de saisir systématiquement la Justice à leur encontre en utilisant les dispositions de l’article 40 du code de procédure pénale. Enfin, samedi à Paris, 27 commerces ont été pillés et 124 dégradés. A Toulouse, à Bordeaux, à Montpellier, à Saint-Etienne, dans bien d’autres villes encore, trop de commerçants depuis mi-novembre ont vu leur outil de travail injustement saccagé. Un plan de soutien a été décidé et j’ai demandé à Bruno Le Maire de le renforcer. Il reçoit en ce moment même leurs représentants. Par ailleurs, j’ai demandé à l’Agent Judiciaire de l’Etat de rechercher la responsabilité financière des fauteurs de trouble.
Cette nouvelle stratégie se traduira par des mouvements à la tête de la préfecture de police. Mercredi en conseil des ministres, le président de la République nommera Préfet de police, Didier LALLEMENT, ancien secrétaire général du ministère de l’Intérieur, actuel Préfet de Nouvelle Aquitaine. Le ministre de l’intérieur lui adressera une lettre de mission claire et il lui reviendra de nous propose rapidement les changements nécessaires dans son équipe.
Un dernier mot pour nos forces de l’ordre dont je veux à nouveau saluer l’engagement et le professionnalisme. Je sais qu’en leur demandant plus de mobilité, nous les exposerons à des contacts plus durs. Je veux leur dire que leur protection sera notre priorité et fera partie intégrante de notre plan et des manœuvres qui seront envisagées. Je sais aussi pouvoir compter sur eux et que, même sous la pression, ils continueront de faire preuve de maîtrise et d’exemplarité. J’attends que le pays tout entier se regroupe derrière eux.

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