Discours à l'occasion du Dîner "Europlace"

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Édouard Philippe.

Publié 12/07/2018

Mercredi 11 juillet 2018
Seul le prononcé fait foi
Madame la ministre, chère Nathalie,
Madame la secrétaire d’Etat, chère Delphine,
Messieurs les présidents d’Europlace,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et messieurs,
« London is a riddle. Paris is an explanation ». Naturally I would not have made this comparison by myself. This quote actually comes from a very talented English writer and a gentleman, G. B Chesterton, subject of our Gracious Majesty the Queen Victoria.
I don’t know whether London is a “riddle”. I know for sure however that with Brexit, Europe has entered in a period of great political uncertainty.
I don’t know whether Paris is an “explanation” either. I can tell you for sure however that Paris, the Paris Region, in the face of this uncertainty, has come up with an “offer”, rather than an “explanation”.
This offer is bold, straight-forward: we want to provide global investors, financial institutions, with new opportunities and a strong and stable environment to invest, relocate, expand their business in France and across Europe. We want you to make you all feel welcome, warmly welcome, in France.
Since May 2017, we have been consistent and focused, delivering on our agenda, sticking to our commitments, keeping our promises. And believe me this is not finished, there is more to come. On this field also there is more to come.
If you don’t mind I will go on in French. I’ve been diverted by Football these past few days I’m afraid, instead of practicing my English.
Pour la petite histoire, en plus d’avoir écrit un essai comparant les deux capitales, - ce qui est toujours un exercice à hauts risques – Chesterton a publié plusieurs recueils de nouvelles dont l’un s’intitule : « Le club des métiers bizarres », très adapté à cette réunion. C’est vrai qu’ils sont parfois un peu «bizarres» vos métiers. Il suffit de discuter avec certains d’entre vous pour s’en rendre compte. Vos métiers sont très techniques, très spécifiques. Des métiers mal connus – ce qui est souvent pire que de ne pas être connu du tout. Des métiers qui sont néanmoins essentiels, absolument essentiels pour financer l’économie et la croissance des entreprises. Pour qu’une innovation, une bonne idée, puissent recevoir des financements. Pour qu’une PME innovante puisse traverser sans encombre la fameuse « vallée de la mort » pour ensuite croître et atteindre une taille intermédiaire. Pour ça, il faut beaucoup de technique. De l’expérience. Du flair. French, le flair de préférence. De l’audace et reconnaissons-le parfois, une petite dose d’inconscience. Il en faut toujours un peu.
Il se trouve qu’il y a un an, j’avais eu le plaisir de m’exprimer devant vous, dans un autre lieu mais un même contexte. Je me souviens que je vous avais promis de faire « très court ». Beaucoup de choses ont changé en un an.
D’abord, Augustin de Romanet, à qui je veux dire ici ma très grande confiance et mon amitié, succéde à Gérard Mestrallet, qui connaît la très grande estime que je lui porte et dont je salue le remarquable travail, à la présidence de Paris Europlace. Ensuite, en un an, j’ai appris à faire des discours plus longs. Et surtout, troisième bonne nouvelle : en un an, nous sommes parvenus à faire revenir en France des investisseurs étrangers. À inverser une tendance, qui avait presque fait de notre pays un « épouvantail » à investisseurs. Désormais, la France attire. Les investisseurs reviennent. Ce n’est pas moi qui le dis, mais les baromètres : les projets d’investissements étrangers en France ont augmenté de 31% en 2017. Paris est devenue, pour la première fois depuis très longtemps, la ville européenne la plus attractive.
Il y a un an, j’avais expliqué les raisons pour lesquelles la France avait besoin d’une place financière forte pour réussir la stratégie économique de mon Gouvernement et j’avais expliqué comment nous voulions nous y prendre pour atteindre cet objectif. Je ne peux pas résumer mieux cet objectif que par cette phrase du Président de la République lors de nos premières rencontres, notre objectif est de faire en sorte que la France redevienne le pays le plus attractif et le plus compétitif d’Europe.
Une place financière forte c’est un élément de cette politique générale. Ça peut se construire, patiemment. Avec constance et ténacité. Cette constance et cette ténacité, j’ai voulu en faire la marque de fabrique de notre stratégie économique. Et de notre politique d’attractivité. Le monde qui vient est un monde incertain, et probablement dangereux.
Comme je l’ai dit samedi aux rencontres économiques d’Aix-en-Provence, dans un monde incertain, la stabilité et la ténacité sont des qualités d’autant plus précieuses qu’elles sont rares. Nous devons donc être stables sur nos appuis et concentrés sur notre travail.
D’où ma présence ce soir, avec beaucoup d’élus de la région d’Ile-de-France et Paris, j’ai en effet tenu à faire le point sur les mesures que nous avions annoncées il y a un an.
Les mesures fiscales et sociales que j’avais annoncées ont toutes été mises en œuvre dans le cadre des ordonnances « Travail » et dans le budget 2018 ousont en voie de l’être dans le cadre du projet de loi PACTE dont l’examen va bientôt commencer au Parlement. Un projet qui prévoit par exemple un renforcement important du régime dit des « Impatriés » et la création d’un régime optionnel d’affiliation à l’assurance-vieillesse française pour faciliter la mobilité internationale.
À ces mesures d’attractivité financière, nous avons ajouté des mesures qui visent à consolider la place juridique de Paris. Parce que les deux vont de pair et ce que nous cherchons à développer, c’est un écosystème. Avec la Garde des Sceaux, nous avons ainsi annoncé la création d’une chambre commerciale internationale, au sein de la Cour d’Appel et du Tribunal de commerce de Paris.
Cette chambre est désormais pleinement opérationnelle et les premières audiences sont en train de se tenir.
Dernières mesures, cette fois de nature éducative. Au mois de janvier dernier, à l’occasion du sommet de Versailles, avec Jean-Michel Blanquer et Valérie Pécresse, nous avions annoncé un plan d’action pour développer en Île-de-France l’offre scolaire internationale. Qui comprenait une politique éducative multilingue. Les deux vont ensemble.
Dès cette rentrée, celle de 2018, nous allons ouvrir 1 000 places supplémentaires dans les lycées internationaux et les sections internationales de la région.
Au mois de mars dernier, nous avons mis en place un point d’accueil unique pour faciliter la mobilité des familles vers Paris. Le ministère, la région ont également mis en ligne un guide de l’enseignement international public et privé en Île-de-France.
Nous voulons aussi développer la certification internationale du niveau obtenu en France en langue anglaise. Vaste sujet, mais beau sujet. Beau sujet, parce que pour beaucoup de jeunes très talentueux, l’anglais reste un frein, un obstacle à la mobilité. Une frontière invisible, mais bien réelle.
Dans les prochaines semaines, Jean-Michel Blanquer et Frédérique Vidal me feront des propositions pour généraliser la certification, en commençant par les cursus internationaux de BTS et de licence professionnelle avant d’en élargir le principe aux lycées et aux universités.
À ces mesures, il convient d’ajouter quelques coups de pioche. Ou plutôt de tunneliers. Je veux parler de ceux du projet de CDG Express et surtout du Grand Paris Express qui est, à ce jour, le plus grand projet d’infrastructures de transports en Europe qui va radicalement transformer la façon de se déplacer dans la région Île-de-France.
Ces mesures, il faut les réinscrire dans leur dimension européenne. C’est ce que nous avons fait en mai dernier en trouvant un accord au Conseil de l’Union européenne pour conforter l’union bancaire. Mais cet accord doit nous inciter à aller plus loin. Car l’Europe financière se trouve encore au milieu du gué en matière d’investissements. Dans une « Europe financière idéale », la zone euro devrait être « auto-suffisante », c’est-à-dire que l’argent des Européens devrait suffire à financer les entreprises européennes, ce qui n’est pas le cas. Comment y remédier ? En facilitant les investissements transfrontaliers et la circulation de l’épargne dans l’U.E. Pour cela, il faut des marchés financiers intégrés ; des règles qui convergent ; des autorités européennes de supervision qui fonctionnent efficacement.
Ce qui sera peut-être bientôt le cas puisque le président de la République et la Chancelière allemande ont placé l’approfondissement de l’union bancaire et de l’union des marchés de capitaux au cœur des priorités de la feuille de route franco-allemande pour la zone euro. Tout cela peut sembler un peu technique aux yeux du grand public. Ça l’est. Mais c’est un pilier extrêmement important de la souveraineté européenne.
Nos engagements sont donc tenus. Pas question pour autant de s’arrêter en si bon chemin. Je prends deux exemples, qui prolongent et amplifient ce que je viens de dire.
Premier exemple : celui de l’éducation.
Avec le soutien de la mairie de Courbevoie, avec celui du Conseil départemental des Hauts-de-Seine et celui de la région Île-de-France, nous allons créer une école européenne. Le dossier d’agrément a été déposé cette semaine. Cette école, qui ouvrira ses portes en septembre 2019, accueillera des élèves de la maternelle à la terminale. Elle préparera notamment au Baccalauréat européen.
Bien sûr, cette école s’adresse d’abord aux enfants des personnels des deux agences européennes qui sont ou seront bientôt présentes à Paris : je veux parler de l’autorité européenne des marchés financiers et de l’autorité bancaire européenne. Mais cette école, nous souhaitons, avec les élus présents, qu’elle accueille aussi des enfants franciliens. Pour qu’eux aussi puissent bénéficier de cette ouverture sur le monde. Sur la pratique des langues étrangères. Sur les cultures européennes. Je ne sais pas pour vous mais ça donne sacrément envie de grandir à Courbevoie. Et pour les parents, cette école a l’avantage de se trouver non loin du quartier de la Défense. Comme ça, tout le monde est content.
Second domaine dans lequel nous voulons aller plus loin : la simplification. Le monde est compliqué, La France est parfois compliquée surtout quand on vient de l’étranger. Raison de plus pour le simplifier quand on le peut.
C’est d’abord le cas des normes. Je le reconnais, en France, on aime les normes. C’est bien, il en faut. On les aime tellement qu’on en change souvent et que parfois il nous arrive de faire du zèle, par exemple quand il s’agit de transposer en droit français, des normes européennes.
On appelle ça la « sur-transposition » là où une « juste transposition » aurait suffi. Depuis l’été dernier, mon Gouvernement a donc engagé une « cure de simplification », en particulier dans le domaine des services financiers. Une cure que nous allons poursuivre dans le cadre du projet de loi PACTE. Avec toujours cet objectif : supprimer les contraintes que le droit européen n’impose pas. Ainsi, par exemple : nous relèverons de 2,5 à 8 millions d’euros le seuil d’établissement d’un prospectus à publier en cas d’offre au public de titres financiers, qui est le niveau de référence du texte européen. Ça peut sembler anecdotique. Mais des exemples comme ceux-là, il en existe des centaines. Nous allons donc poursuivre ce chantier de suppression des « sur-transpositions » dans la durée avec constance et ténacité.
L’autre grand enjeu de simplification, ce sont les règles et les procédures fiscales. Nous avons mis en place un point d’entrée unique, qui s’intitule « Tax for business ». Ce point d’entrée se trouve placé auprès du directeur général des finances publiques. Son but ? Informer les investisseurs étrangers sur la fiscalité française, faciliter aussi leurs démarches, leur expliquer notamment comment fonctionne le régime des « Impatriés », qui est un vrai avantage offert par la place de Paris.
Ce régime d’ailleurs, nous allons le simplifier pour les fonds d’investissement qui se relocalisent à Paris : à l’avenir, les distributions afférentes à des parts de supports d’investissement acquis à l’étranger, qu’on appelle communément des « carried interest », seront systématiquement traités comme des plus-values mobilières et seront donc soumis à la « flat tax ».
Dans la zone euro, on a certes la même monnaie, mais l’Europe demeure une sorte de « Babel fiscal » dans lequel on ne parle pas la même langue. C’est pourquoi, nous devons relancer le chantier de la convergence fiscale. Avec l’Allemagne, nous souhaitons par exemple accélérer le projet européen d'harmonisation de l’assiette de l'impôt sur les sociétés. Et dans le cadre de ce projet, la possibilité d’amortir fiscalement de ce qu’on appelle le « goodwill » -sujet dont je sais qu’il intéresse certains d’entre vous- sera introduite en France. L’intérêt de ce projet, c’est d’offrir beaucoup plus de simplicité, de fluidité et de transparence aux investisseurs.
Comme je crains d’avoir à mon tour un peu « sur-transposé » le temps qui m’était imparti, je vais m’arrêter là. Coupe du monde oblige, Royaume-Uni oblige aussi, je terminerai par ce bel hommage du Daily Telegraph au lendemain de la victoire de la France contre l’Argentine : « On a retrouvé l’équipe de France que l’on espérait depuis si longtemps : la France de la jeunesse, de l’énergie et de l’aventure ». Au fond, le Daily Telegraph a tout dit.
Je vous remercie.

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