Portrait d'Aude Baron

« Être une femme ne m’a ni posé de problème, ni avantagée »

Le sport, un « truc de mec » ? Si le cliché a la vie dure, Aude Baron est de ces femmes qui lui mettent du plomb dans l’aile. A 33 ans, elle a pris en février la tête de la rédaction d’Eurosport.fr et d’une équipe 100% masculine. Facile de se faire respecter dans ces conditions ? Témoignage positif d’une fille du web qui sait ce qu’elle veut.

 
« Mon autorité n’a jamais été remise en question, et si un jour elle est remise en question, c’est que j’aurais été mauvaise en management, pas parce que je suis une femme. »
Rendez-vous est pris un mercredi soir dans le 7e arrondissement de Paris pour la séance photo. Aude Baron arrive à vélo, elle sort juste du bureau et surveille ses emails. « C’est soirée de Ligue des champions », nous explique-t-elle. En chemisier et jupe longue elle porte des baskets aux pieds. « Pour des raisons médicales à la base mais finalement ça va bien avec mon métier », ironise-t-elle.  Depuis début février, Aude est en effet rédactrice en chef d’Eurosport.fr. Sous ses ordres, une quinzaine de journalistes, que des hommes. Un challenge ? « Que je sois une femme ne pose aucun problème. Mon autorité n’a jamais été remise en question, et si un jour elle est remise en question, c’est que j’aurais été mauvaise en management, pas parce que je suis une femme ». D’ailleurs, Aude n’est pas experte en sport. C’est pour ses compétences en culture numérique qu’elle a été recrutée.

Aude BaronJournaliste radio de formation, elle s’est très vite tournée vers le web, un secteur qui embauchait. « Mon parcours n’est fait que d’opportunités que j’ai saisies ou que j’ai provoquées », explique-t-elle. Elle lance ainsi son blog, resto-de-paris.com, pour s’exercer et  avoir des supports numériques à présenter. En janvier 2008, elle intègre lepost.fr (devenu Huffington Post) et y crée la rubrique « culture web ». En mars 2011, elle rejoint Le Nouvel observateur et lance, « à partir d’une page blanche », Le Plus, l’espace collaboratif qui atteint 2 millions de visiteurs uniques.

Le web, un secteur plus mixte que la presse généraliste ? Oui … pour les journalistes, nous confirme Aude. Il y aurait même plus de femmes que d’hommes. Par contre les rédactrices en chef se font plus rares. « Je suis devenue rédactrice en chef à 29 ans et nous ne sommes pas nombreuses ».  Pour autant, le milieu est sûrement plus favorable à l’émergence de talents féminins. « Dans le milieu de la presse écrite, de la télévision et de la radio les hommes ont pu historiquement s’installer », explique-t-elle. « Sur le web, on a appris sur le tas et il n’était plus question de femmes ou d’hommes. Ceux qui ont émergé sont ceux qui ont appris rapidement. C’est sûrement ce qui m’a permis d’avoir cette évolution de carrière ».

Professionnellement, « je préfère considérer qu’on est sur un pied d’égalité » avec les hommes, affirme Aude Baron. Également d’un point de vue salarial ? « Je n’ai jamais pensé que j’étais moins payée parce que j’étais une femme et j’en ai même eu la preuve. Les seules différences salariales que j’ai connues étaient basées sur les compétences ». Même son de cloche  quand on aborde la question de la maternité : « je n’ai pas d’enfant », admet-elle, « mais j’ai été embauchée chez Eurosport à 32 ans et jamais on ne m’a demandé si j’avais ou si je comptais avoir des enfants ». « Je suis d’une génération où les questions de la maternité et de la paternité se posent en termes beaucoup plus égalitaires », poursuit-elle. C’est d’ailleurs le cas à Eurosport.fr : certains journalistes de son équipe ont des enfants et doivent articuler vie familiale et professionnelle, emmener leurs enfants à l’école ou prendre leurs congés sur les vacances scolaires. « C’est tout à fait normal ».
 
« Je suis d’une génération où les questions de la maternité et de la paternité se posent en termes beaucoup plus égalitaires »

« Il y a beaucoup de constructions intellectuelles autour de la place des femmes », conclut-elle. « Je suis convaincue que, si on intègre l’idée qu’être une femme peut poser problème, on se pose les problèmes soi-même ».

 
 
 

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