Discours de la Première ministre Élisabeth Borne : présentation de la stratégie hydrogène

Ce contenu a été publié sous le gouvernement de la Première ministre, Élisabeth Borne.

Publié 28/09/2022 France 2030

Madame et Messieurs les ministres,
Madame la préfète,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Monsieur le président du Conseil régional, cher Xavier BERTRAND,
Madame la présidente du Conseil départemental, chère Nadège LEFEBVRE,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le secrétaire général pour l’investissement, cher Bruno BONNELL,
Monsieur le président, cher Laurent BURELLE,
Monsieur le directeur général, cher Laurent FAVRE,
Mesdames et Messieurs,
Ces derniers temps, un mot revient souvent dans mes interventions. Le mot : défi.
Nous avons face à nous des bouleversements majeurs stratégique, énergétique, climatique. Des bouleversements qui nous conduisent à revoir nos manières de penser, de produire, de consommer.
Ces bouleversements sont autant de défis. Ils pourraient nous emporter. Nous arrêter. Mais il n’en est rien. Je suis convaincue que la France et l’Europe ont toutes les cartes en main pour faire de ces défis des opportunités. Pour construire un pays décarboné et souverain.
Cette conviction, je la tiens
de la détermination de mon Gouvernement,
de la volonté de nos territoires et de leurs élus,
du talent de nos chercheurs et de nos entrepreneurs.
Cette conviction, je vous le dis, je l’ai d’autant plus après cette visite.
Ici, chez Plastic Omnium, j’ai vu l’innovation à l’œuvre, la R&D de pointe et l’industrie au service de notre avenir.
Mesdames et Messieurs,
La pandémie, la guerre en Ukraine et la crise énergétique qui l’accompagne, ont été autant de rappels à l’ordre.
Ils nous ont montré la nécessité de reconquérir notre souveraineté industrielle, énergétique et d’accélérer notre sortie des énergies fossiles.
Alors, nous avons tenu ce cap. Et en même temps que nous répondons aux urgences et aux crises, nous préparons l’avenir de notre pays.
Cet avenir passe par la réindustrialisation.
Nous avons fait de la France un pays où il fait de nouveau bon investir.
Nous avons allégé la fiscalité sur les entreprises avec la réduction de l’impôt sur les sociétés, une baisse massive des impôts de production et, dans les deux années qui viennent, la suppression de la CVAE.
Nous avons levé les freins à l’emploi et bon nombre des lourdeurs du marché du travail. C’est le sens des ordonnances Travail, de la réforme de l’apprentissage, de la réforme de l’assurance chômage. Nous allons continuer. Et, dès la rentrée parlementaire, l’Assemblée nationale et le Sénat examineront une nouvelle étape de la réforme de l’assurance chômage.
Nous avons lancé un choc de simplification. Il est insupportable que des projets s’enlisent, étouffés par les procédures. Plusieurs textes ont été votés dans le précédent quinquennat et un projet de loi présenté lundi en Conseil des ministres permettra de simplifier les procédures pour les projets d’énergie renouvelable.
Enfin, nous avons décidé d’une politique d’investissement massive dans les secteurs stratégiques.
France Relance a posé les premiers piliers, en permettant à notre pays de se reconstruire plus fort et plus compétitif.
Et France 2030, annoncé par le président de la République il y a un an, nous donne 54 milliards d’euros pour préparer les transitions à venir.
Les résultats sont là.
Projet après projet, notre pays a retrouvé son attractivité.
Nous avons mis fin à l’hémorragie des délocalisations. Depuis 5 ans, 120 nouveaux sites industriels se sont implantés en France. A titre de comparaison, nous avions perdu 400 usines entre 2010 et 2015.
Et au cours du précédent quinquennat, nous avons recréé pour la première fois des emplois industriels après plus de 15 ans de diminution.
Nous sommes en train de reconstruire notre indépendance productive. La décennie 2020 sera celle du retour de l’industrie.
Je sais que cette réindustrialisation se déroule dans un contexte particulier.
Nous traversons une crise énergétique grave. L’arrêt quasi-total des livraisons de gaz russe provoque des tensions d’approvisionnement sur toute l’Europe.
Nous avions anticipé cette situation. Nous avons accéléré le remplissage de nos stocks de gaz, augmenté nos capacités d’importation et diversifié nos approvisionnements.
Nous nous tenons prêts à faire face, également, à tous les cas de figure. Le président de la République a annoncé cet été un plan de sobriété et chaque entreprise travaille à établir le sien. La sobriété est la clé d’un hiver serein. Il ne s’agit pas de produire moins. Il s’agit de baisser un peu la température et d’éviter toute consommation inutile.
Nous devrons aussi faire preuve de solidarité européenne. Nous devons livrer du gaz à nos voisins, qui, en retour nous livreront de l’électricité. Cet hiver, manquer de solidarité, c’est risquer de manquer d’électricité.
La situation géopolitique et la maintenance de certains de nos réacteurs nucléaires entraînent une hausse vertigineuse des prix de l’énergie. Cependant, soyons lucides : ces hausses traduisent des craintes excessives des marchés voire de la spéculation.
Nous allons agir, au niveau européen, pour ramener les cours du gaz et de l’électricité à des niveaux plus raisonnables. J’échangerai demain avec le Chancelier SCHOLZ pour évoquer ce sujet.
Mais dans le même temps, nous devons protéger les Français face à la hausse des prix.
Il y a deux semaines, j’ai annoncé la prolongation d’un bouclier tarifaire sur les prix du gaz et de l’électricité. Les prix auraient dû augmenter de 120%. Ils augmenteront de 15%. L’Etat prendra le reste à sa charge. 
Ce bouclier s’applique à tous les foyers, mais aussi aux petites communes et aux très petites entreprises.
Bien sûr, toutes les entreprises en difficulté doivent être accompagnées.
Avec Bruno LE MAIRE, nous souhaitons que les aides mises en place depuis juillet pour les entreprises très exposées à la hausse des prix de l’énergie soient simplifiées et élargies. Nous avons demandé à la Commission européenne de faire évoluer les règles sur ces aides.
Vous devez également avoir un accès facile aux prêts garantis par l’Etat résilience, mis en place pour faire face aux conséquences de la guerre en Ukraine.
Le PGE résilience, c’est jusqu’à 15% de votre chiffre d’affaires moyen des trois dernières années. C’est un moyen efficace de vous aider à traverser cette période. Je compte donc sur la mobilisation des banques : s’agissant de prêts dont l’Etat est garant, vous ne devriez pas avoir de difficultés à les contracter.
Enfin, si des problèmes persistent pour certaines entreprises, nous étudierons les situations au cas par cas.
Mesdames et Messieurs,
Répondre aux urgences sans en tirer les leçons ni préparer l’avenir ; ce serait s’arrêter au milieu du chemin.
Nous avons besoin d’une énergie compétitive, durable, souveraine. Alors, au croisement des transitions énergétique et industrielle, se trouve l’hydrogène.
Avec l’hydrogène, nous pourrons décarboner massivement notre économie, y compris les secteurs les plus consommateurs comme la sidérurgie ou la mobilité lourde.
Nous améliorerons notre bilan carbone.
Nous pourrons faire émerger une nouvelle filière, synonyme d’emplois durables et d’indépendance énergétique. 100 à 150 000 emplois pourraient être créés d’ici 2030.
Nous créerons une filière d’exportation. Avec notre dispositif de soutien à l’export, nous pourrons promouvoir notre industrie, notre expertise scientifique et technologique et nos normes. 
Alors, nous nous sommes fixés des objectifs ambitieux : faire de la France le leader de l’hydrogène décarboné.
Pour y parvenir, il fallait investir massivement. C’est ce que nous avons fait en décidant de mobiliser 9 milliards d’euros entre 2020 et 2030.
Pour réussir, nous devions aussi nous doter d’un plan d’action et bâtir une filière hydrogène complète.
Nous avons décidé de développer, de front, notre offre et notre demande. Nous voulons privilégier les secteurs dans lesquels une offre française existe déjà. Sans cela, nous financerions des importations en augmentant notre empreinte carbone.
Nous avons choisi, également, d’investir sur l’ensemble de la chaîne de valeur : recherche, innovation, développement des compétences… Nous nous concentrerons sur deux filières en priorité : l’électrolyse et les équipements à hydrogène pour la mobilité lourde et professionnelle.
Plastic Omnium est un parfait exemple de cette stratégie. Penser notre filière, c’est prévoir les réservoirs d’hydrogène. C’est ce que propose le projet que nous venons de voir et, bientôt, non loin d’ici, s’implantera l’usine qui les produira. 
Ce projet, ce sont 160 millions d’euros d’investissement entre 2022 et 2028, avec 150 emplois à la clé.
C’est l’implantation, en France, d’activités de R&D et de savoirs faire industriels.
C’est aussi le partenariat entre l’Etat, le secteur privé et les collectivités. Ce partenariat est le fondement de notre réussite industrielle et énergétique. Nous devons continuer à le développer.
Depuis 2 ans, notre stratégie hydrogène se déploie.
Nous avons commencé par investir dans les outils les plus critiques pour baisser les coûts et, gagner notre souveraineté technologique et énergétique. Je pense aux électrolyseurs, aux piles à combustibles, aux réservoirs, aux matériaux. C’est en les maîtrisant que nous serons au rendez-vous de la décarbonation de notre économie et de la conquête des marchés mondiaux.
Dans le même temps, nous avons lancé des opérations de décarbonation pilotes grâce à l’hydrogène. Sidérurgie, chimie, verrerie, raffinerie sont autant de secteurs concernés sans oublier les transports routier, ferroviaire, aérien. Nous voulons engager ces filières sur la voie de la neutralité carbone.
Ensuite, dès que nous aurons engagé la baisse les coûts et qu’une offre française sera disponible, nous pourrons passer à une nouvelle étape de notre stratégie : le déploiement massif de l’hydrogène, dans tous les secteurs et sur tout le territoire.
Notre stratégie hydrogène, nous l’avons bien sûr conçue dans un cadre européen.
Depuis 2020, 23 Etats-membres et la Norvège ont lancé un Projet important d’intérêt européen commun sur l’hydrogène. Nous voulons faire de ce PIIEC une rampe de lancement pour l’hydrogène décarboné en Europe. Plus de 100 projets ont été présentés en août 2021 à la Commission européenne. Une première vague de 41 projets a été sélectionnée.
Et j’arrive devant vous avec une bonne nouvelle. Grâce à notre action et au dynamisme de nos entreprises, je vous annonce que 10 projets français ont été sélectionnés pour un investissement public de 2,1 milliards d’euros.
Pour cette première vague, notre pays représente un projet sur quatre. C’est une reconnaissance de notre stratégie et du travail accompli par tous les acteurs. C’est aussi l’occasion d’un pas de géant pour l’hydrogène en France.
Mais notre stratégie ne portera ses fruits que si nous avançons ensemble, public et privé ; Etat, collectivités et entreprises. Au total, pour ces 10 projets, c’est 5,3 milliards d’euros que nous investirons ensemble.
Alors, ensemble, nous allons pouvoir construire les 10 premières gigafactories françaises.
Ces nouvelles usines seront implantées dans 7 régions et créeront près de 5 200 emplois directs sur le territoire.
Elles viseront la production d’électrolyseurs, de réservoirs d’hydrogène, de piles à combustible, de véhicules, de trains à hydrogène et de matériaux.
Ce sont des entreprises nouvelles ou petites comme McPhy, Genvia (JANVIA), Elogen (ÉLOGÈNE).
Ce sont aussi de grands acteurs qui prennent des risques comme Plastic Omnium, Symbio, Hyvia, Forvia, Arkema, John Cockerill ou encore Alstom.
Mais ce sont surtout les premières pierres d’une filière qui naît grâce à France 2030, grâce à l’Europe, grâce à la détermination des acteurs du secteur privé.
Car je vous le dis : ces investissements ne sont qu’un début.
Une deuxième vague de projets européens a été autorisée la semaine dernière par la Commission et comprend des projets français supplémentaires. Il s’agit cette fois d’avancer sur la production et les usages de l’hydrogène décarboné.
Une dizaine de dossiers français restent en lice pour une troisième et une quatrième vague centrées autour des infrastructures de production et de la mobilité hydrogène. Nous veillerons à ce que ces projets bénéficient des mêmes modalités de soutien. Aucun projet ne sera laissé de côté.
Enfin, je n’oublie pas que l’émergence d’une filière passe aussi par un cadre règlementaire adapté. Nous allons continuer à nous battre, au niveau européen, pour faire reconnaître l’apport de l’hydrogène bas carbone dans l’atteinte de nos objectifs de baisse d’émission.
Aujourd’hui :
-la production d’hydrogène est bien reconnue comme une activité durable ; -et les lignes directrices pour les aides d’Etat permettent de soutenir les projets de production d’hydrogène alimentés par le mix français.
Ce sont des points positifs mais nous resterons extrêmement attentifs et vigilants sur les régulations européennes pour l’hydrogène et, plus largement, pour les énergies renouvelables.
Mesdames et Messieurs,
En prenant le tournant de l’hydrogène décarboné, la France a fait le choix de l’emploi, de la souveraineté et de la neutralité carbone.
En deux ans, nous avons réalisé des avancées immenses. Aujourd’hui, nous sommes bien positionnés pour être un leader européen et mondial de l’hydrogène décarboné.
Nous en sommes capables. Et en nous appuyant sur l’Europe, sur notre recherche, sur le secteur privé, sur les collectivités, nous réussirons ensemble.
J’ai confiance dans notre avenir. Confiance dans notre réindustrialisation décarbonée. Confiance dans notre future filière hydrogène.
Construisons-la, ensemble. Je vous remercie.

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