Discours de la Première ministre Élisabeth Borne - Déclaration de politique générale devant le Sénat

Ce contenu a été publié sous le gouvernement de la Première ministre, Élisabeth Borne.

Publié 18/07/2022

« Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Il y a quelques heures, j’ai prononcé devant l’Assemblée nationale la déclaration de politique générale de mon Gouvernement.
Par respect pour nos Institutions,
Par attachement pour notre Parlement, pour le bicamérisme,  
Par engagement pour nos territoires,
J’ai souhaité, ce soir, m’adresser à vous.
De mes années au service de l’État,
De mes cinq ans comme membre du Gouvernement,
De ces premières semaines comme Première ministre,
J’ai tiré une conviction, qui n’a cessé de se consolider : je n’imagine pas la République sans le Sénat.
Vous êtes à la fois les relais des préoccupations des Français.
Les voix des élus locaux et des territoires.
La force d’équilibre et d’apaisement de nos Institutions.
Dans les urnes, les Français nous ont appelés à trouver des solutions communes et à répondre ensemble aux défis qu’ils affrontent.
Ils nous ont demandé des débats francs mais respectueux.
Ils ont voulu des propositions fortes et demandé des compromis.
Ils ont exigé de l’action, mais avant cela de l’écoute des forces vives, des territoires, des Français.
Bâtir des solutions ensemble, en écoutant les propositions de tous, en s’appuyant sur nos territoires, en restant fidèles à nos valeurs, c’est la méthode du Sénat depuis longtemps.
Nous devrons nous inspirer de l’expérience et des pratiques du Sénat.
A l’heure où notre histoire politique va connaître une nouvelle étape, nous avons, plus que jamais besoin de vous.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Ce soir, en m’adressant à vous, je vous parle avec responsabilité et humilité.
Responsabilité, car les années qui viennent de s’écouler ont été éprouvantes pour bon nombre de nos concitoyens.
On a parlé d’années de crises. J’ai surtout vu chez les Français, le courage, la force de caractère et la volonté. Grâce à eux, la France n’a jamais baissé la tête.
Notre pays a tenu et je veux saluer ici les deux Premiers ministres qui m’ont précédée, Édouard Philippe et Jean Castex. J’ai eu l’honneur de servir dans leurs Gouvernements, de mener avec eux des réformes essentielles.
A leurs côtés, j’ai vu deux hommes d’État, qui ont traversé les difficultés et les épreuves avec force et droiture. Ils sont des exemples, je veux les saluer.
Responsabilité, car nous connaissons tous les défis devant nous.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie est le rappel douloureux que la paix est fragile. Je vous sais très attentif, monsieur le président du Sénat, à la situation ukrainienne. Et vous serez dans quelques heures à Kiev.
Cette guerre a des conséquences concrètes : l’inflation et la montée des prix de l’énergie pèse sur le pouvoir d’achat des Français.
Les perspectives économiques s’assombrissent.
L’épidémie de Covid n’a peut-être pas dit son dernier mot et nous devons rester vigilants.
Le réchauffement climatique devient à chaque seconde plus inéluctable.
L’insécurité gâche encore le quotidien de trop de nos concitoyens.
Les inégalités territoriales sont autant de fractures dans le pacte républicain, et menacent l’unité de nos concitoyens.
Alors, nous avons la responsabilité d’agir.
Nous le devons aux Français.
Mon Gouvernement s’y emploiera avec force.
Ces dernières semaines, à quatre reprises, les Français ont choisi entre les différents projets qui se présentaient à leurs suffrages.
Ils ont réélu le président de la République puis, ils ont élu une Assemblée nationale avec une majorité relative.
Dans ce résultat, nous entendons la volonté d’un dialogue accru et de construction commune. Dans le verdict des urnes, il y a également des inquiétudes, des peurs, des colères. Dans l’abstention, trop forte, nous devinons, aussi, de la défiance, parfois de la résignation.
Beaucoup de Français n’ont plus confiance dans la politique et dans nos Institutions pour leur apporter des solutions concrètes et changer leurs quotidiens. Nous devons leur répondre.
Cela passe d’abord par une action résolue, par des résultats concrets, qui se voient et changent les quotidiens des Français. J’y reviendrai.
Cela implique des changements institutionnels, aussi, j’en suis convaincue. Mais on ne modifie pas nos Institutions sans consulter, sans consensus.
Le Sénat sera pleinement associé aux réflexions et à la mise en œuvre des évolutions de nos Institutions. Sous l’égide du président de la République, une commission transpartisane sera lancée à la rentrée pour y parvenir.
Répondre au message des Français, c’est changer certaines pratiques.
Bâtir des compromis, ce n’est pas se renier. C’est choisir de construire autour de ce que nous avons en commun. Ce n’est pas mettre de côté nos différences. C’est assumer les clivages et les désaccords mais refuser les postures.
En cela, le Sénat a été précurseur. Mon Gouvernement partage avec vous bon nombre de priorités, et même, sans aucun doute, de solutions.
Dans certains domaines et pour certains textes, au-delà de ce que la Constitution prévoit, le travail parlementaire pourra commencer dans cet hémicycle avant de se prolonger à l’Assemblée nationale.
Ainsi, le Sénat pourra pleinement agir comme force de co-construction, au service des territoires et des Français.
Répondre au message des Français, cela veut dire : associer et donner la parole à tous.
Mon Gouvernement consultera les corps intermédiaires, les forces vives de notre pays. Nous mènerons chaque réforme en lien avec les partenaires sociaux. Nous serons à l’écoute de tous nos compatriotes, de leurs aspirations et de leurs idées.
Nous agirons, surtout, en lien étroit avec les élus locaux.
Les élus locaux sont les premiers interlocuteurs des Français, et les meilleurs connaisseurs de leurs territoires. Ils sont les visages du courage et de l’engagement. Ils sont en première ligne face à toutes les urgences. Ils sont les premiers innovateurs, bien souvent précurseurs pour les mobilités ou la transition écologique. 
La crise sanitaire nous l’a montré, une fois de plus.
Pour aider nos concitoyens, ils étaient présents.
Pour la campagne de vaccination, ils étaient présents.
Pour expliquer, alerter, accompagner, ils étaient présents.
Je veux rendre hommage aux élus locaux.
Pour chaque projet, mon Gouvernement les associera, les écoutera.
Pour chaque défi, nous nous inspirerons de leurs idées et de leurs actions. 
Ils doivent avoir de la visibilité, de la stabilité. Il n’y aura pas de grands bouleversements dans les compétences des collectivités.
Ils doivent avoir les moyens d’agir. Nous définirons avec eux un agenda territorial, avec un accord sur des objectifs et des moyens, notamment financiers.
Ils doivent avoir du poids. Le conseiller territorial peut être l’occasion d’une complémentarité plus forte entre département et régions. Sur ce sujet, nous lancerons des concertations approfondies l’année prochaine.
Surtout, les élus locaux et plus largement les territoires, doivent pouvoir prendre des décisions adaptées au contexte local.
Je le crois fermement, répondre au message des Français, cela passe par des solutions au plus près du terrain.
Les cinq dernières années ont été l’occasion de premiers pas.
Nous avons entamé le retour des services publics partout dans notre pays. Plus de 2000 maisons France Services ont vu le jour. Notre objectif est simple : pas un Français avec une Maison France Services à plus de 30 minutes de chez lui.
Nous avons avancé dans le déploiement de notre couverture mobile et haut-débit. Nous avons investi pour faire revenir la vie et l’activité dans le centre des villes et des bourgs. Nous avons donné aux collectivités les moyens de solutions différenciées.
Je veux ici dire un mot de la Corse. Le cycle des discussions engagé avec les élus et les forces vives sera relancé dans les prochains jours. Il doit aboutir à des solutions concrètes pour tous les Corses et notamment la jeunesse.
Des solutions concrètes pour le travail, pour le logement, pour la transition écologique, pour le développement économique et la sécurité.
Nous sommes prêts à ouvrir tous les sujets, y compris institutionnels. A les discuter en transparence, dans un esprit constructif et responsable. Mais ne cédons pas à la facilité. Répondons, au cas par cas, à ce qui bloque ou dysfonctionne.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Je veux vous proposer une méthode pour notre action des cinq années qui viennent.
Il est temps de rendre son sens au mot « égalité ».
Trop longtemps, nous avons cru qu’il signifiait qu’une règle unique, dictée depuis Paris, devait s’appliquer partout, toujours et sans adaptation possible.
L’égalité réelle, ce n’est pas un carcan. C’est nous fixer des ambitions communes et trouver les solutions adaptées pour les atteindre.
Car, Mesdames et Messieurs les Sénateurs. Qui peut réellement affirmer que les enjeux de santé sont les mêmes dans le centre de Lyon ou dans les banlieues de Point-à-Pitre ? Qui peut réellement penser que les écoliers des quartiers nord de Marseille font face aux mêmes défis que ceux des villages du Calvados ?
Bien sûr, il y a des enjeux communs.
Mais la justice territoriale, ce sont des solutions différenciées.
Mais la cohésion des territoires, ce sont des marges de manœuvre données.  
Pour la santé, pour l’éducation, pour la transition écologique, pour la ruralité, pour la ville, nous associerons les élus, les habitants, les associations. Avec eux, nous dresserons des constats. Avec eux, nous trouverons des solutions. Avec eux, nous nous donnerons des moyens.
Je souhaite ici, avoir un mot particulier pour nos compatriotes des outre-mer.  Il y a quelques jours, l’appel de Fort-de-France a été un nouveau signal d’alarme.
Les outre-mer, c’est une jeunesse prête à s’engager.
Les outre-mer, ce sont des trésors de biodiversité.
Les outre-mer, ce sont les places fortes de notre souveraineté.
Grâce aux outre-mer, le drapeau tricolore flotte partout dans le monde,
Alors, dans tous les outre-mer, la promesse républicaine doit être tenue.
Avec les collectivités, nous agirons :
  • pour la présence des services publics ;
  • contre la vie chère ;
  • pour le développement économique et l’emploi ;
  • contre la délinquance et l’immigration illégale.
Ce quinquennat sera également l’occasion d’une nouvelle étape dans notre histoire républicaine avec la Nouvelle-Calédonie. J’y prendrai toute ma part.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
J’ai confiance en nous et je suis déterminée.
Je sais la volonté constante du Sénat de bâtir au service de la France et d’agir au service des territoires, des Français. Cette volonté, mon Gouvernement la partage.
Alors, ensemble, autour du projet du président de la République, nous allons dialoguer, échanger et construire les réponses aux urgences et aux défi que nous avons à relever. 
*
Le premier défi, c’est celui du pouvoir d’achat.
De nombreuses mesures ont été prises depuis l’automne dernier pour limiter la hausse des prix de l’électricité, du gaz ou de l’essence.
C’est grâce à nos investissements massifs, nous avons limité la hausse des prix. Et l’inflation, en France, est la plus faible de la zone euro.
Mais nos concitoyens ressentent encore chaque jour les effets de la guerre, les prix qui augmentent et leur quotidien s’en trouve affecté.
C’est la raison pour laquelle, mon Gouvernement présentera demain en Conseil des Ministres des textes d’urgence et des mesures concrètes, rapides, efficaces.
Pour les ménages, nous prolongerons le bouclier tarifaire sur les prix du gaz et de l’électricité.
Pour ceux qui travaillent, nous proposerons des baisses de charge pour les indépendants, le triplement du plafond de la prime pouvoir d’achat et une aide pour ceux qui ont besoin de leur voiture pour aller travailler.
Pour les retraités, nous revaloriserons les pensions.
Pour les plus démunis, les prestations sociales seront augmentées.
Pour les étudiants, nous allons revaloriser les bourses sur critères sociaux.
Pour les fonctionnaires, c’est le dégel du point d’indice pour les trois versants de la fonction publique – et nous pourrons discuter, ensemble, des meilleurs moyens d’accompagner les collectivités, surtout les plus vulnérables.
Ces mesures sont notre base de travail. Avec mon Gouvernement, nous serons à votre écoute et vous pourrez les amender lors du travail parlementaire.
Mais je veux réaffirmer trois principes qui doivent nous guider :
  1. La responsabilité environnementale, d’abord.
  2. Il nous faudra systématiquement mesurer l’impact de nos mesures sur l’environnement.
  3. La responsabilité budgétaire, ensuite.
Je sais que beaucoup y tiennent dans cet hémicycle, à raison.
Après avoir protégé les Français durant la crise, nous devons retrouver des perspectives claires pour l’amélioration des comptes publics. C’est une nécessité pour continuer à financer notre modèle social. C’est un impératif pour notre souveraineté.
Devant vous, je pose donc des jalons clairs :
  • En 2026, nous devrons commencer à baisser la dette.
  • En 2027, nous devrons ramener le déficit public sous la barre des 3%.
Je souhaite que nous puissions travailler ensemble à atteindre ces objectifs.
Nous vous proposons de le faire, grâce à une croissance forte, durable, qui créera des emplois, grâce à des réformes essentielles pour notre pays, grâce à la lutte contre la fraude, à la modernisation de l’État et à des mesures de bonne gestion.
Enfin, notre troisième principe, c’est le respect de l’engagement pris par le président de la République devant les Français : pas de hausses d’impôts.
Nous l’avons fait durant le précédent quinquennat en supprimant la taxe d’habitation et baissé l’impôt sur le revenu. Au total, nous avons diminué les impôts des Français et des entreprises de plus de 50 milliards.
Dès cet été, nous vous proposerons la suppression de la redevance audiovisuelle. Elle ira de pair avec une réforme de l’audiovisuel public, qui garantira son indépendance et des moyens durables. Nous y travaillerons avec le Parlement.
Je veux le dire aussi, ce combat pour le pouvoir d’achat nous ne le mènerons pas seuls. Les entreprises qui dégagent des marges devront aussi prendre leurs responsabilités.
*
Notre deuxième défi, c’est de bâtir ensemble, la société du plein emploi.
Vous connaissez ma conviction : c’est par le plein-emploi et par le bon-emploi que nous changerons notre rapport au travail.
Durant le précédent quinquennat, nous avons mené des réformes en profondeur pour transformer le marché du travail, pour l’apprentissage, pour la formation des demandeurs d’emploi, pour nos jeunes avec le plan « 1 jeune, 1 solution » ou par le Contrat d’Engagement Jeune.
Ces réformes ont porté leurs fruits :
  • Le taux de chômage est au plus bas depuis 15 ans ;
  • Le taux de chômage des jeunes est au plus bas depuis 40 ans.
Grâce à ce bilan, le plein-emploi est à notre portée.
Nous pourrons sortir de la logique du chômage de masse et redonner le pouvoir de négociation aux salariés. Quand il y a des tensions sur le marché du travail, les employeurs doivent être plus attractifs, améliorer les conditions de travail et monter les salaires.
Alors, je vous propose de jeter, avec le Gouvernement, toutes nos forces dans la bataille du plein-emploi. Nous devrons ramener vers l’emploi celles et ceux qui sont les plus éloignés du marché du travail.
Nous devons continuer notre action envers les jeunes.
Nous devons permettre l’insertion des bénéficiaires du RSA en assurant un meilleur équilibre entre droits et devoirs.
Nous devons mieux accompagner nos chômeurs.
Aujourd’hui, l’État, les régions et les départements avancent trop souvent en ordre dispersé. Nous devons joindre nos forces et c’est pourquoi nous transformerons Pôle Emploi en France Travail.
Le plein-emploi, enfin, c’est permettre une meilleure orientation dès l’enseignement secondaire et offrir des formations tout au long de la vie.
C’est ainsi que nous pourrons affronter les défis de demain et former dans les prochaines années 1 million de jeunes dans les métiers d’avenir, notamment dans les domaines de la transition écologique et le numérique.
Enfin, le plein-emploi, c’est la garantie de continuer à créer des richesses et de financer notre modèle social. Nous dirons les choses clairement, à vous, comme aux Français :Notre système social est un paradoxe, à la fois l’un des plus généreux et l’un de ceux où l’on travaille le moins longtemps. Aujourd’hui, on part à la retraite plus tard chez la totalité de nos voisins européens.
Alors, je le dis :
  • pour la prospérité de notre pays et la pérennité de notre système par répartition ;-pour bâtir de nouveaux progrès sociaux ;
  • pour qu’aucun retraité avec une carrière complète ne gagne une pension inférieure à 1100 euros par mois ;
  • pour sortir de situations, où le même métier ne garantit pas la même retraite.
Oui, nous devrons travailler progressivement un peu plus longtemps. La réforme que nous mènerons ne sera pas uniforme. Elle devra tenir compte des carrières longues, de la pénibilité, de l’emploi des seniors.
Cette réforme, nous la mènerons en concertation étroite avec les partenaires sociaux et nous vous associerons le plus en amont possible.
*
Mesdames et Messieurs les Sénateurs, Je vous propose ensuite d’apporter des réponses radicales à l’urgence écologique.
Devant ce défi, nous devons faire bloc, sortir de la querelle entre les radicaux et les pragmatiques.
Nous devons changer, nous adapter et bâtir une écologie de progrès.
Car la révolution écologique permettra des innovations, fera émerger des filières nouvelles et créera des emplois d’avenir. Nous avons déjà fait des avancées significatives.
Mais pour atteindre la neutralité en carbone en 2050 et réduire nos émissions de 55% d’ici 2030, nous devons avoir une action encore plus résolue et organisée. Des concertations seront lancées dès septembre pour bâtir une loi d’orientation énergie-climat.
Tout le monde doit en prendre sa part.
Tous les ministères.
Le président de la République m’a confié la charge de la planification écologique et chacun aura une feuille de route climatique avec des objectifs à tenir.
Toutes les filières.
Nous définirons avec elles des objectifs de réduction d’émission, un calendrier et des moyens pour le respecter.
Tous les territoires.
Par leurs compétences, les collectivités sont au cœur de notre transition écologique. Bien souvent, elles ont également été précurseurs.
Nous avancerons avec les élus locaux et nous définirons des stratégies adaptées avec eux. C’est pourquoi nous avons créé un ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Par notre action, nous avons les moyens d’être la première grande nation à sortir des énergies fossiles.
Nous y parviendrons par un mix énergétique plus équilibré autour des énergies renouvelables et du nucléaire. Nous aurons besoin de piloter parfaitement notre transition énergétique. C’est pourquoi j’ai confirmé aujourd’hui, l’intention de l’Etat de détenir 100% du capital d’EDF.
Cette évolution permettra à EDF de renforcer sa capacité à mener dans les meilleurs délais des projets ambitieux et indispensables pour notre avenir énergétique.
Nous mènerons la transition énergétique, aussi, en consommant moins.
Nous devons nous préparer à toutes les décisions possibles de la Russie. Nous sommes moins exposés, mais nous serions tout de même impactés par les décisions. Dès maintenant, nous nous préparons donc à tous les scénarios. Je ne mentirai pas. Nous avons les moyens de tenir, mais il faudra agir.
Plus largement, nous devons décarboner tous les pans de notre économie, de notre vie.
Cela vaut dans l’industrie. Et nous nous appuierons sur les 50 milliards d’euros d’investissements d’avenir de France 2030.
Cela vaut pour le logement. Nous continuerons grâce aux succès du précédent quinquennat et rénoverons 700 000 logements par an.
Cela vaut pour notre agriculture, j’y reviendrai.
Ce sera le cas pour les transports, enfin.
Nous voulons permettre à chacun, quel que soit le territoire où il habite, d’avoir accès à un moyen de transport propre.
Nous agirons pour le ferroviaire, en prolongeant les investissements de ces dernières années pour les petites lignes, pour les trains de nuit, pour les lignes du quotidien.
Nous offrirons à chacun une alternative à la voiture thermique.
Chaque Français devra avoir accès à une voiture zéro-émission, notamment grâce aux aides à la conversion et à un système de location longue durée à moins de 100 euros par mois.
*
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Je sais que nous partageons l’ambition d’une République de l’égalité des chances.   
Cette République de l’égalité des chances c’est celle du refus de l’assignation à résidence ; c’est celle qui rompt les inégalités de destins.
C’est dès la naissance que tout se joue.
Par le chantier des 1000 premiers jours comme par le service public de la petite enfance que nous voulons bâtir avec les collectivités, nous voulons répondre au problème à la racine. 
Notre objectif : trouver des solutions de garde pour les enfants de moins de 3 ans, offrir les 200 000 places d’accueil manquantes, agir en priorité pour les parents, le plus souvent les mères, qui élèvent seules leurs enfants.
Bâtir la République de l’égalité des chances, c’est agir aussi pour l’école.
Celle qui conforte les savoirs fondamentaux : lire, écrire, compter, respecter autrui. Mais prépare aux savoirs de demain, comme le codage informatique.
Celle qui garantit l’égalité, et ne renonce jamais à l’excellence.
Celle qui offre des savoirs mais prépare aussi à des métiers.
Nous voulons rapprocher l’enseignement secondaire et les métiers et réformer le lycée professionnel.
Nous aurons à mieux associer les enseignants à la transformation de l’école. Nous devons revaloriser leurs salaires et construire, avec eux, les évolutions de leur profession.
Dans la ligne du plan « Marseille en grand », lancé par le président de la République, nous voulons donner des marges de manœuvre et d’adaptation aux établissements, en fonction de leurs besoins et de leurs territoires.
Une concertation, avec la communauté éducative, les élus, les associations, sera lancée dès septembre.
Pour que notre jeunesse continue de faire vivre les valeurs républicaines, mon Gouvernement continuera à déployer le Service national universel.
Nous continuerons à promouvoir notre université et notre enseignement supérieur. Cela passe par un travail pour l’égalité des chances, par la simplification du système de bourse, par l’amélioration des conditions de vie et d’études de nos jeunes.
Construire l’égalité réelle, c’est partager les moyens de l’émancipation. Le sport comme la culture.
A l’aube des Jeux Olympiques et paralympiques de 2024, il nous faut bâtir une nation sportive qui partage le goût de l’exercice physique, du dépassement, de l’effort.
À nous aussi de bâtir une Nation culturelle, qui valorise, soutient et protège son patrimoine, ses créateurs, ses industries créatives. Le pass culture est une réussite. Aussi nous l’étendrons dès la sixième et amplifierons l’éducation artistique et culturelle.
Sans une santé de qualité, il n’y a pas d’égalité des chances.
En ville comme en ruralité, nous faisons face à un manque de soignants et les effets de la suppression du numerus clausus ne se feront pas sentir immédiatement.
Le défi de la santé, c’est d’abord celui de la prévention. Pour dépister, pour prévenir, il nous faut agir ensemble, avec les élus et en particulier les maires, et activer tous les leviers : qualité de l’air, habitat, conditions de vie.
Nous aurons aussi à poursuivre le soutien à nos soignants.
Nous avons tous été les témoins admiratifs et reconnaissants de leur engagement lors de la crise Covid.    
Le Ségur de la santé a permis de grandes avancées, notamment en termes de rémunérations.
Mais la situation est encore loin d’être réglée.
Pour cet été, nous avons pris des mesures d’urgence. Il faut maintenant voir plus loin et construire des solutions durables. Cela veut dire renforcer l’attractivité des métiers du soin, permettre aux soignants d’être au maximum auprès des patients et renforcer la coopération entre les professionnels de santé.
A nous, ensemble, avec les élus locaux, les professionnels de santé, les patients, de moderniser et d’adapter l’offre de soins pour chaque territoire.
Des concertations seront lancées dès septembre, partout sur le territoire. Nous voulons en priorité trouver des solutions contre les déserts médicaux. Je sais combien le Sénat partage cette priorité.
Je veux ajouter, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, que nous n’avons pas encore tourné la page du Covid. L’épidémie reprend ces derniers jours, fort. A l’heure actuelle, notre système de soin n’est pas impacté. Nous devons toutefois rester extrêmement prudents et vigilants.
La République de l’égalité des chances, c’est celle qui offre une vie sereine à tous les âges.
Nous devons faire croitre l’espérance de vie en bonne santé et assurer une meilleure prise en charge que ce soit à domicile ou en maison de retraite.  Cela passe par l’aménagement des logements de nos ainés - c’est le sens de « MaPrim’Adapt » - et par l’amélioration de la vie de nos ainés en maisons de retraites.
Après les témoignages insoutenables des derniers mois sur les maisons de retraite, nous avons renforcé les contrôles. Nous devons maintenant construire les EHPAD de demain : mieux médicalisés, ouverts, humains.
D’ici 2027, nous devons recruter 50 000 infirmiers et aides-soignants. Ce défi est aussi immense qu’indispensable compte tenu de la révolution démographique à laquelle nous faisons face. Nous y parviendrons en renforçant l’attractivité des professions.
Nous réussirons ce défi avec les départements. C’est ensemble que nous bâtirons un service public du grand âge à la hauteur.
Vous le savez, le quinquennat précédent a porté une attention particulière à rendre notre société plus inclusive. Le handicap, c’est 12 millions de Français. Toutes nos familles sont concernées. Toutes attendent que nous poursuivions notre effort pour renforcer l’accessibilité, pour l’autonomie, pour une meilleure reconnaissance des personnels de l’accompagnement. Nous aborderons tous ces sujets lors de la conférence nationale du handicap qui se tiendra début 2023.
J’ajoute qu’avec vous, avec les associations, mon Gouvernement réformera l’Allocation adultes handicapés en partant du principe de la déconjugalisation.
Il s’agira d’une réforme en profondeur. Elle était très attendue.
Enfin, je crois qu’il n’y a pas d’égalité des chances sans sécurité.
Cette conviction, je la tiens de mon histoire, de mon parcours.
Je la tiens de mes fonctions de préfète.
Je la tiens de mes échanges avec les Français.
Comme beaucoup de maux, l’insécurité touche d’abord ceux qui sont les plus démunis. Elle brise des jeunes. Emporte des familles.
Elle touche les zones rurales comme les zones urbaines.
L’insécurité est une inégalité. Une des plus odieuses. Des plus inacceptables.
Avec mon Gouvernement, je suis déterminée à agir.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs, je suis convaincue que dans ce domaine, nous pouvons faire beaucoup et ensemble. Nous avons en commun, la volonté d’assurer une vie sereine à tous nos concitoyens. Nous avons en commun, le soutien, la confiance et l’exigence pour nos forces de l’ordre.
Durant le précédent quinquennat, des avancées ont été réalisées.
10 000 policiers et gendarmes ont été recrutés.
Notre sécurité civile a été renforcée.
Nous avons prolongé l’action menée depuis 2015 pour mieux lutter contre le terrorisme et pour nos services de renseignement.
Je vous propose d’écrire la prochaine étape ensemble. Autour d’une loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur, nous voulons :
Agir plus encore pour la sécurité du quotidien.
Préparer notre police aux défis du futur, notamment la cyberdélinquance.
Amplifier encore notre lutte contre les trafics.
Pour y parvenir, nous vous proposerons de renforcer les moyens du ministère de l’Intérieur.
Pour mieux assurer l’ordre républicain, nous créerons 11 nouvelles unités de force mobile.
Pour lutter contre ce que trop de Français vivent comme des zones blanches de sécurité, nous créerons 200 nouvelles brigades de gendarmerie.
Ce défi, j’y tiens. Je suis élue d’un département rural. J’ai été préfète d’une région largement rurale.
Ce défi, vous y tenez. Je sais combien la chambre des territoires est attentive à cette égalité devant la sécurité.
Mais les moyens supplémentaires ne sont qu’une partie de la solution. La solution, c’est le refus de toute impunité.
Nous voulons doubler le temps de présence des policiers et des gendarmes sur la voie publique d’ici 2030 et réformer la filière de l’investigation.
La solution, c’est aussi une justice efficace, rapide, dont les décisions sont respectées.
Les États généraux de la Justice, lancé par le président de la République, nous ont montré le besoin de moyens et de méthodes nouvelles. Nous voulons restaurer la confiance entre la Justice et nos citoyens. Répondre aux attentes des personnels. Garantir, toujours, l’indépendance de la justice.
Pour aider les magistrats à faire leur métier et réduire, nous recruterons 8500 personnels de Justice supplémentaires. Nous vous proposerons ces moyens dans un projet de loi de programmation pour la Justice.
Nous voulons aussi que les peines soient exécutées et lutter contre la surpopulation carcérale. 15 000 places de prison seront construites dans les prochaines années.
Je veux dire ici un mot d’un sujet qui me tient à cœur : la lutte contre les violences, sexuelles, sexistes et intrafamiliales. Elle impose la mobilisation de tous les acteurs : forces de l’ordre, justice, associations, élus. Le combat continuera. Je m’y engage.
Je souhaite également que nous continuions à avancer dans notre lutte contre toutes les discriminations. L’égalité femme – homme, notamment, est la Grande cause de ce quinquennat.
Croyez bien qu’en tant que deuxième Première ministre de notre pays, elle sera au cœur de mon engagement.
*
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
La pandémie, la guerre en Ukraine, les crises migratoires nous ont rappelé que notre souveraineté est à la fois profondément française et profondément européenne. 
Sans l’Europe pas de vaccins,
Pas de sanctions concertées contre la Russie,
Pas de réponse efficace pour nos frontières.
Alors, je vous propose de consolider notre souveraineté au sein de l’Europe. De bâtir une France plus forte, dans une Europe plus indépendante.
Cela passe par la souveraineté énergétique face au risque de dépendance au gaz et au pétrole russe.
Cette souveraineté française et européenne, se construit aussi par l’industrie et le numérique.
Ces dernières années, grâce à des baisses d’impôts et des réformes courageuses, nous avons porté un coup d’arrêt à la désindustrialisation.
Il faut poursuivre cette dynamique. C’est pourquoi nous vous proposerons de supprimer la CVAE dans la loi de finances de 2023. Cette mesure, c’est de la compétitivité pour nos entreprises, et surtout pour les PME et les TPE.
En m’adressant à vous, je devine votre préoccupation. Je le dis, donc : nous compenserons cette perte de ressources pour nos collectivités.
Notre souveraineté industrielle, c’est aussi investir dans les secteurs d’avenir comme l’alimentation, l’énergie, le spatial, les bio médicaments ou l’électronique.
Notre souveraineté, c’est aussi une recherche qui fait la fierté de notre pays.
Nous voulons continuer à valoriser et simplifier le métier de chercheur.
Notre souveraineté, enfin, c’est assurer l’avenir de la filière agricole.
Je sais combien ce défi vous importe. C’est mon cas, aussi.
Avec les acteurs, avec vous, nous bâtirons une loi d’orientation et d’avenir pour notre agriculture. Elle devra permettre de répondre à tous les défis de l’agriculture et particulier les départs massifs à la retraite des prochaines années.
C’est d’abord une meilleure rémunération. Par le soutien à la transmission des exploitations, à l’entreprenariat.
C’est la poursuite de notre soutien massif à l’adaptation de l’agriculture au changement climatique, avec l’assurance récolte, avec des moyens de protection des exploitations.
C’est l’investissement pour de nouvelles productions, les protéines végétales, notamment.
C’est la protection, dans les accords internationaux, contre la concurrence déloyale des pays qui ne respectent pas nos critères sociaux et environnementaux.
C’est une politique d’alimentation, qui respecte chacun des acteurs et leur donne une juste rémunération. Beaucoup a été fait lors du premier quinquennat. Nous devons continuer.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs, 
 Une France plus forte dans une Europe plus indépendante, c’est également tenir nos frontières.
Au niveau européen, nous poursuivrons le travail entamé sous présidence française.
Au niveau national, nous resterons fidèles à notre tradition d’asile.
Et pour que cette politique soit juste, nous devrons poursuivre l’accélération du traitement des demandes.
A ceux que nous accueillons, nous devons offrir une meilleure intégration par le travail.
Et nous devons, aussi, reconduire plus rapidement ceux dont la demande d’asile a été refusée.
Je veux le dire aussi : disposer d’un titre de séjour en France impose de respecter ses lois. Nous serons intransigeants.
En matière d’immigration irrégulière, nous continuerons notre lutte à tous les niveaux. Nous créerons une « force des frontières ». Nous poursuivrons notre combat contre les passeurs. Ils organisent de véritables trafics d’êtres humains. Ils doivent être poursuivis, sanctionnés.
Une France plus forte dans une Europe plus indépendante, enfin, c’est notre souveraineté stratégique.
Le contexte géopolitique est un rappel sévère.
Nous devons pouvoir nous défendre.
Nous devons pouvoir faire entendre notre voix.
Partout et dans tous les milieux, nos Armées se battent pour notre liberté – parfois au péril de leur vie.
Je veux dire à nos Armées notre confiance et notre soutien.
Je veux leur rendre hommage. Et avoir une pensée pour nos soldats tombés au combat, pour les familles endeuillées, et pour tous ceux, revenus des terrains d’opération, meurtris dans leur chair ou dans leur esprit.
Le contexte et les désordres du monde nous obligent.
Nous devons disposer d’un modèle d’armée complet, équilibré, modernisé. Un modèle d’armée cohérent et capable d’agir.
Le précédent quinquennat a permis un effort sans précédent depuis la fin de la Guerre froide pour nos Armées et nous avons respecté l’exécution de la loi de programmation militaire.
Nous devons maintenant poursuivre et amplifier cet investissement.
Prochainement, le président de la République annoncera les contours d’une nouvelle loi de programmation militaire.
Il donnera une vision et un cap à nos Armées comme à notre industrie de défense. Nous tiendrons notre rôle. Nous agirons en cohérence avec nos ambitions européennes et nos alliés de l’OTAN.
Nous devons aussi fortifier la résilience de la Nation. Et, par une réserve renforcée, par des actions auprès de notre jeunesse, par le travail sur la mémoire, par l’attention portée à nos anciens combattants, nous renforcerons le lien Armée – Nation.
*
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Dans un contexte géopolitique bouleversé, dans un monde qui n’est pas encore sorti de la pandémie, dans un pays qui connait une situation politique inédite, nous avons des défis nombreux à relever.
Ma réponse, notre réponse avec tout le Gouvernement, et sous l’autorité du président de la République, tient dans une ambition forte et dans une méthode nouvelle. Dans les années qui viennent, le Sénat sera plus que jamais au cœur de la recherche de compromis et de la volonté de construction.
Une nouvelle étape commence. Et comme je l’ai demandé aux députés tout à l’heure, je vous propose de bâtir, ensemble. Nous pouvons le faire.
Rassemblés autour de nos valeurs. Celles de la République.
La liberté, l’égalité, la fraternité, la laïcité.
Rassemblés autour de la volonté d’agir.
Rassemblés autour de majorités d’idées.
Rassemblées autour de l’ambition de rendre notre pays plus fort, plus solide, mieux préparé pour affronter les défis de demain.
J’ai confiance en nous, j’ai confiance en notre capacité à relever les défis de l’avenir.
Ensemble.
Je vous remercie. »

Partager la page


Le choix de la rédaction