Cinquième Comité interministériel du Tourisme

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Édouard Philippe.

Publié 14/05/2020

(Seul le prononcé fait foi)
Nous venons de tenir le 5ème comité interministériel du tourisme qu’il m’a été donné de présider depuis mai 2017. Le Comité interministériel du tourisme est un organisme, une instance, qui réunit tous les acteurs du tourisme en France, les élus locaux, les organisations syndicales particulièrement représentatives d’un certain nombre de structures touristiques, des entreprises, des opérateurs et les membres du Gouvernement. Si c’est le 5ème Comité interministériel du tourisme que je tiens depuis que je suis à Matignon, c’est parce que l’ensemble du Gouvernement est très fortement mobilisé sur l’objectif de développer le tourisme en France, à la fois quantitativement mais surtout qualitativement. L’année 2019 avait été une bonne année s’agissant de l’activité touristique en France, avec près de 90 millions de voyageurs internationaux, et nous étions en passe d’atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés et qui sont pilotés au quotidien par le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères. Évidemment le 5ème Comité interministériel du tourisme se tient dans des circonstances très exceptionnelles, et très sombres. Le tourisme fait probablement face à la pire épreuve de son histoire moderne, alors même que c’est un des fleurons de l'économie française. Son sauvetage est une priorité nationale.
Depuis lundi, tout en gardant à l’esprit que la crise sanitaire est loin d’être achevée, la France reprend prudemment, progressivement, le chemin de l’activité économique. Mais alors même que cette reprise est en cours, des pans entiers de notre économie restent paralysés, au premier rang desquels celui des professionnels du tourisme que nous avons réunis ce matin. Ils ont formulé une angoisse que je peux parfaitement comprendre et qui est parfaitement légitime. Angoisse face au présent, face à la réalité de cette crise sanitaire, angoisse face à l’avenir. Ils ont également indiqué leur très grande détermination à faire en sorte que nous puissions dépasser cette étape difficile et je les en félicite. Je comprends même que l’on puisse, le cas échéant, ressentir une forme d’injustice en voyant certaines activités reprendre et en ne pouvant pas soi-même reprendre la sienne.
Ce qu’il faut comprendre c’est que l’essence même de vos métiers - cela n’est pas la moindre des ironies de cette pandémie - qui est d’accueillir, de rassembler dans un même temps, dans un même lieu beaucoup de gens différents, des amis, des amoureux, des familles. L’essence même de ce métier se trouve contrariée. Le plaisir très français, qui est d’une certaine façon au cœur de notre identité, de se retrouver, de bien manger, de discuter, de se rencontrer est comme compromis par le confinement d’abord et par les conditions du déconfinement.
Le Covid-19 nous empêche encore de reprendre ces habitudes. Nous voulons éviter vous le savez le risque d’une deuxième vague qui ruinerait les efforts consentis par tous les Français pendant ces deux mois de confinement. Alors nous suivons tous ensemble une stratégie de déconfinement progressif, étape par étape. Nous préparons les protocoles qui permettront de réouvrir dès que cela sera possible. Nous aurons les réponses des autorités sanitaires au cours de la semaine du 25 mai, sur les dates et les modalités de réouverture des secteurs touristiques.
En attendant, le Gouvernement ne veut pas prendre le risque de laisser sinistré un secteur si important pour le pays. Ayons en tête les chiffres : le tourisme, l’événementiel culturel et sportif, ce sont près de 2 millions d’emplois directs et indirects en France, près de 8% de notre richesse nationale. C’est une place de leader mondial incontesté, avec près de 90 millions de touristes étrangers venus nous voir l’an dernier. Ce qui est bon pour le tourisme est souvent bon pour la France, Ce qui frappe le tourisme frappe évidemment la France en plein cœur. Retenez ce chiffre : 95% des hôtels français sont aujourd’hui fermés.
La fermeture de tous ces lieux de vie et de commerce, c’est bien sûr un drame pour tous les professionnels du secteur. C’est l’une des pires nouvelles à affronter pour un Gouvernement qui a fait de l’attractivité du territoire un axe de sa politique économique. C’est pour cette raison que nous avons pris très tôt des mesures d’urgence, dont le secteur du tourisme a pleinement bénéficié. Je veux rappeler que la quasi-totalité du secteur a recours aujourd’hui au chômage partiel, et que 6,2 milliards d’euros de prêts garantis par l’Etat (PGE) ont déjà été pré-accordés à 50 000 entreprises du secteur, soit près de 10% du total des PGE.
Nous avons dessiné aujourd’hui un plan de soutien exceptionnel autour de deux grands axes. Le premier, c’est de permettre au secteur de tenir bon, face à la crise actuelle, en limitant les faillites et les licenciements, afin de lui permettre de se reconstruire. Le deuxième axe c’est de tracer des perspectives et préparer sa réouverture à court terme.
Je voudrais insister sur les moyens financiers exceptionnels que nous dégageons pour permettre au secteur de surmonter la crise. Nous avons construit les mesures de soutien autour de trois temps : le temps très court de l’urgence – il faut passer cette urgence -, le temps moyen du déconfinement et le long terme, c’est-à-dire le temps de la reconquête de la place de la France au premier rang du tourisme mondial.
Les mesures que nous allons mettre en œuvre sont les suivantes.
Le fonds de solidarité restera ouvert pour les entreprises du secteur hôtellerie-restauration-tourisme jusqu’à la fin de l’année 202. Son accès sera élargi à des entreprises de plus grande taille, celles qui ont jusqu’à 20 salariés et jusqu’à 2 millions d’euros de chiffre d’affaire, ce qui n’était pas le cas dans le fonds de solidarité tel qu’il existait jusqu’à présent. L’aide qui sera versée pourra aller jusqu’à 10 000 euros.
Les dispositifs de prêts au secteur hôtellerie-restauration-tourisme seront renforcés. Un « Prêt garantis État » que nous allons rappeler le « Prêt garantis État Saison » sera mis en place. Ses conditions seront plus favorables que celles du PGE classique avec notamment un plafond pouvant atteindre le chiffre d’affaires des trois meilleurs mois de l’année précédente. Dans le PGE normal, le plafond est de 25% du chiffre d’affaires. Compte tenu de la très forte saisonnalité des activités touristiques, c’est pour un très grand nombre d’entreprises la possibilité d’avoir recours de façon bien plus importante à ces PGE, ce qui est une excellente nouvelle. L’enveloppe des « prêts Tourisme » de Bpifrance qui sont plébiscités par le secteur sera portée de 250 millions à 1 milliard d’euros. Là aussi, cette bonne nouvelle qui va permettre à beaucoup d’acteurs de passer cette étape dans de bien meilleures conditions. Enfin, les banques se sont engagées à systématiquement proposer aux PME du secteur un report des mensualités de tous leurs prêts sur 12 mois et non plus simplement sur 6 mois comme aujourd’hui. Là aussi c’est un élément très important pour soulager la trésorerie.
Autre mesure : les cotisations sociales patronales dues entre mars et juin seront exonérées pour les entreprises du secteur hôtellerie-restauration-tourisme, et l’exonération sera prolongée tant que la fermeture durera. Pour aller plus loin, un crédit de cotisations de 20% des salaires versés depuis février sera accordé aux entreprises pour accompagner la reprise d’activité. Ce crédit de cotisation, qui est une forme d’aide sans précédent, sera imputable sur l’ensemble des cotisations dues. Au total, ces allègements de cotisation représentent plus de 2 milliards d’euros d’aide directe au secteur. C’est massif, c’est nécessaire, et cela produira l’effet recherché.
Sur le chômage partiel, les entreprises du secteur pourront continuer d’y recourir dans les mêmes conditions qu’aujourd’hui au moins jusqu’à la fin du mois de septembre 2020. Au-delà, le chômage partiel leur restera ouvert si les activités reprennent trop lentement, dans des conditions qui seront le cas échéant revues.
Aider la trésorerie c’est important, mais il faut également permettre le redémarrage de l’investissement, c’est pourquoi un plan d’investissement accompagne ce plan global que je présente. Un plan d’investissements en fonds propres de 1,3 milliard d’euros sera porté par la Caisse des dépôts et par Bpifrance que je voudrais très sincèrement saluer et remercier pour leur très forte mobilisation à nos côtés en faveur du secteur du Tourisme. Ces 1,3Md€ vont en générer 6,7Md€, en attirant d’autres capitaux, privés, sur le secteur.
Une offre d’accompagnement sera proposée : elle permettra à plus de 2 000 entreprises d’en bénéficier, ainsi qu’à des collectivités locales, avec le renforcement du dispositif France Tourisme Ingénierie. Lorsque nous mettons en place de nombreuses mesures, il faut pouvoir accompagner leur mise en place auprès des acteurs concernés.
Nous avons également décidé de proposer et de mettre en œuvre, à l’occasion de la prochaine loi de finance rectificative, un dispositif aux collectivités locales qui, si elles le souhaitent, pourront prévoir, pour l’année 2020, des allègements de taxe de séjour ainsi qu’un dégrèvement des deux tiers de la cotisation foncière des entreprises du secteur, que l’Etat financera alors pour moitié. Il s’agit d’inciter les collectivités territoriales et singulièrement les municipalités, les communautés d'agglomération ou communautés de communes, à prendre des mesures et de les accompagner pour qu’elles puissent les prendre et aider les entreprises du secteur.
Enfin, nous souhaitons soutenir la demande. C’est la raison pour laquelle nous allons doubler le plafond d’utilisation des tickets-restaurants à compter de la réouverture des restaurants et faire en sorte que les tickets restaurants soient utilisables le week-end. Cela peut paraître trivial, accessoire : cela ne l’est pas du tout. Cela va permettre là aussi d’accompagner la reprise pour les restaurateurs, dans de bien meilleures conditions, et cela va permettre à tous les tickets restaurants qui n’ont pas été utilisés pendant les mois de confinement d’être réinjectés dans l’économie de la restauration, c’est essentiel.
Je suis précis mais je suis certain que chacun des acteurs du tourisme qui nous écoute comprendra très bien ce que cela signifie pour lui. Si je fais la somme de tout ce que je viens d’indiquer, c’est un engagement de plus de 18 milliards d’euros pour les finances publiques. C’est sans précédent, c’est massif, c’est nécessaire. Nous espérons que cela produira les effets recherchés et je voudrais remercier tous les membres du gouvernement qui ont travaillé avec les acteurs du secteur du tourisme d’arrache-pied pour construire ce plan. Il fallait que la réponse de l’Etat soit à la hauteur de la difficulté rencontrée par ce secteur stratégique.
Ensuite, il faut que nous nous focalisions tous ensemble sur la réouverture du secteur. Accompagner financièrement cette industrie est indispensable, mais permettre dans les meilleures conditions possibles la réouverture de ce secteur est encore plus important.
La question qui occupe tout le monde - les acteurs de ce secteur mais en vérité tous les Français c’est celle des vacances d’été. Il n’y a pas beaucoup de certitudes à ce sujet, compte tenu de tout ce que nous ne savons pas sur l’évolution du virus. Mais nous voulons fixer un cap, et ouvrir les horizons.
Pour les cafés-restaurants, la date de réouverture sera fixée au cours de la semaine du 25 mai ; pour ceux qui sont dans des départements verts, une réouverture le 2 juin pourra être envisagée si l’évolution de l’épidémie ne se dégrade pas et sous réserve que les mesures sanitaires recommandées par le Haut conseil de santé publique soient parfaitement respectées ; Je veux le dire clairement : dans les départements restés en vert, notre objectif c’est de faire en sorte que les cafés et la restauration puissent ouvrir dès le 2 juin. Pour cela il faut que notre capacité à contenir l’épidémie soit démontrée jusqu’au 2 juin, et pour cela il faut que les restaurateurs puissent appliquer les protocoles sanitaires et rouvrir dans les meilleures conditions possibles.
S’agissant des vacances, et sous réserve de l’évolution de l’épidémie et de possibles restrictions localisées en fonction de son évolution, nous privilégions une hypothèse raisonnable : les Français pourront partir en vacances en France au mois de juillet et au mois d'août. Quand je dis en France, c’est évidemment en métropole, dans l’hexagone et dans les outre-mer. A cet égard, je voudrais féliciter et remercier les professionnels de l’hôtellerie et du tourisme d’avoir pris aujourd’hui l’engagement de garantir un remboursement intégral en cas d’annulation des nouvelles réservations effectuées. Les Français peuvent prendre leurs réservations. Les acteurs du tourisme, de l’hôtellerie, se sont engagés à faire en sorte qu’ils soient intégralement remboursés dans l’hypothèse où l’évolution de l’épidémie ne rendrait pas possible le départ en vacances. Parmi les fédérations qui s’engagent, je note en particulier l’UMIH (union des métiers et des industries de l’hôtellerie), le GNI (groupement national des indépendants), le SETO (syndicats des tours opérateurs), l’EDV (entreprises du voyage). Ces engagements sont riches de sens et de promesses pour les Français.
Enfin, et je le souligne j’aurai l’occasion de m’exprimer plus tard sur ce sujet, le Gouvernement va mettre en œuvre dans les jours qui viennent un plan plus particulièrement consacré au tourisme social pour faire en sorte que tous ceux qui ont vécu, dans les conditions parfois les plus dures, le confinement, puissent avoir un accès plus facile à des déplacements, des voyages, des opérations de tourisme social. Nous avons considéré que cet aspect du plan méritait une mise en lumière et une concertation particulière, et dont nous aurons l’occasion de le présenter très rapidement.
Vous le voyez, ce plan est massif, interministériel, juste, global, il doit nous permettre de répondre à la crise et préparer la suite.
Il va également permettre de proposer aux Français, de permettre à nous tous, de nous retrouver, de respirer après de longs mois d’épreuve pendant l’été.
Et nous donnons maintenant rendez-vous à l’ensemble des français à la fin du mois, à l’ensemble des acteurs de ce secteur aussi, pour fixer rapidement les dates de réouverture et la façon dont les choses vont progresser en maîtrisant l’épidémie mais en ayant confiance que nous allons pouvoir reprendre notre vie.

Partager la page


Le choix de la rédaction