Discours à la Cérémonie du 155e anniversaire du combat de Camerone

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Édouard Philippe.

Publié 30/04/2018

Aubagne, lundi 30 avril 2018
Officiers, sous-officiers, caporaux-chefs, caporaux, clairons et légionnaires,
La Légion étrangère commémore ce matin le combat de Camerone, ici à Aubagne, dans les régiments étrangers en métropole et outre-mer, dans les unités engagées en opérations en Afrique et au Levant, et dans le monde entier où les associations d’anciens de votre troupe glorieuse font vivre la mémoire de l’un des plus hauts faits d’armes de notre histoire militaire.
Camerone témoigne en effet des plus belles vertus militaires : le courage qui permit à ces hommes de se dépasser et d’entrer dans la légende ; la volonté de faire face et de ne pas subir ; la fidélité à la parole donnée car c’est l’honneur du soldat ; l'esprit de sacrifice enfin, qui pousse les légionnaires à charger à la baïonnette un ennemi trente fois supérieur en nombre, alors qu’ils savent qu’ils vont mourir.
Camerone dit également une part de ce que vous êtes aujourd’hui, 155 ans après ce combat, tant il est vrai qu’il constitue toujours le socle de la Légion étrangère : une troupe où chaque légionnaire est un combattant, une troupe robuste pour laquelle la mission est sacrée, une troupe où le dépassement de soi et le sens du collectif sont l'exigence du quotidien.
Votre histoire n’était pourtant pas écrite d’avance. Et il fallut, tout au long de ces 187 années depuis votre création par Louis-Philippe en 1831, l’intelligence de vos chefs, une sorte de génie militaire français aussi, pour réussir cette alchimie parfaite de près de 150 nationalités, et forger ainsi une troupe de combattants parmi les plus réputés au monde. Il fallut surtout l’audace, la générosité et le courage des légionnaires, de vos anciens, qui un jour ont choisi comme vous un nouveau départ, choisi de servir un pays qui n’était pas le leur, choisi de servir un idéal.
C’est avec un immense respect que je m’incline devant vos drapeaux et étendards qui portent dans leurs plis le sacrifice des 40 000 légionnaires tombés pour la France, en servant la Légion, votre patrie. Legio patria nostra.
Au milieu de vous, sur cette place d’armes du quartier Viénot, je suis honoré de célébrer Camerone et heureux de vous témoigner l’affection et la gratitude des Français.
Car la Légion étrangère dit en réalité beaucoup sur la France, sur ses valeurs, sur son armée. Elle dit d’abord qu’il n’est pas de grand destin sans engagement, sans effort, sans éducation, sans volonté, sans idéal. Elle dit aussi qu’il n’est pas de grande réussite sans confiance, sans ouverture, sans capacité à s’adapter aux réalités du monde et aux soubresauts de l’histoire. Elle dit finalement l’importance du collectif, de la discipline, des forces morales et de la profonde dimension humaine dans les grandes aventures.
C’est ce subtil équilibre que vous incarnez dans votre esprit de corps, qui forge votre identité, pour vous préparer à « faire Camerone », vous aussi, si un jour la situation l’exigeait.
A la Légion, solidarité n’est pas un vain mot ; il est même au cœur de tout. « Tu n’abandonnes jamais ni tes morts, ni tes blessés » dit le code d’honneur du légionnaire. Et ce sont ceux, qui hier comme aujourd’hui, ont été blessés au combat et ceux qui ont secouru leurs frères d’armes blessés dans leur chair, que nous honorons aujourd’hui.
Médecin, infirmier, auxiliaire sanitaire, anciens prisonniers ou blessés avanceront devant nous dans quelques instants, entourant le médecin-colonel Jean-Louis Rondy, qui porte la main du capitaine Danjou.
Cette main articulée en bois est un beau symbole : relique de Camerone, c’est aussi la main qui guide le plus jeune, qui secoure, qui empoigne le camarade blessé pour l’extraire du combat, qui soigne et qui accompagne sur le chemin souvent long et douloureux du rétablissement.
En commémorant Camerone, je pense à nos blessés et spécialement à vos camarades touchés lors de l’attaque de leur poste à Tombouctou le 14 avril dernier. Je pense à tous vos frères d’armes qui eux aussi font face à ce combat sur leur lit d’hôpital, soutenus et soignés par un service de santé des armées dont l’action est exemplaire, et qui paye lui aussi le prix du sang au combat.
Je m’incline avec respect devant la mémoire des militaires morts pour la France cette année, qui sont allés au bout de leur mission, et spécialement le caporal Bogusz Pochylski et le sergent Anthony Paiba Valverde.
Je pense aussi au colonel de gendarmerie Arnaud Beltrame, dont l’héroïsme a sans aucun doute à voir avec l’esprit de Camerone.
Je pense enfin à ce beau poème de Pascal Bonetti, officier d’artillerie lors de la 1ère guerre mondiale : « qui sait si l’inconnu qui dort sous l’arche immense, mêlant sa gloire épique aux orgueils du passé, n’est pas cet étranger devenu fils de France, non par le sang reçu mais par le sang versé ». Et je me réjouis de la remise de deux décrets de naturalisation par le sang versé à vos deux camarades dans quelques instants.
L’évocation de nos morts et de nos blessés m’amène à vous dire combien, face aux défis du monde, sous l’autorité du Président de la République, le Gouvernement est mobilisé pour une France forte et lucide, où la crédibilité militaire que vous incarnez est une pierre angulaire de notre défense et de notre sécurité.
C’est cette exigence que portent la ministre des armées et le chef d’état-major de l’armée de Terre, comme ils portent celle de l’attention à nos blessés, à leurs familles, et plus généralement à la condition du personnel, et j’y suis très attentif, car il n’y a pas de combat victorieux à l’avant sans un soutien efficace à l’arrière.
Sur ces deux fronts, la Légion étrangère se trouve aussi aux avant-postes, et d’une certaine façon, a toujours su montrer le chemin. More majorum.
Chers légionnaires, la Nation française vous admire ! Soyez fiers et continuez de servir avec honneur et fidélité.
Vive la Légion étrangère, vive la République, vive la France !

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