
La loi du 15 août 2014 relative à l'individualisation des peines et à la prévention de la récidive supprime les peines planchers, crée une nouvelle peine en milieu ouvert, « la contrainte pénale », et vise à éviter les sorties « sèches » de prison (sorties de prison sans mesure d’accompagnement). Elle renforce aussi les droits et garanties des victimes notamment pendant l'exécution de la peine, en instaurant un nouveau dispositif d'indemnisation des victimes. La majorité des dispositions de la loi sont effectives depuis le 1er octobre 2014.
Contenu publié sous la présidence de François Hollande du 15 mai 2012 au 15 Mai 2017
Présentation du projet de loi9 octobre 2013Présentation du projet de loi en Conseil des ministres.
Procédure accélérée16 mai 2014Le Gouvernement ayant engagé la procédure accélérée, le texte ne fera l'objet que d'une seule lecture par les deux chambres du Parlement.
Adoption en 1re lecture10 juin 2014Les députés adoptent le projet de loi en première lecture à l'Assemblée nationale.
Adoption par le Parlement17 juillet 2014Le projet de loi relatif à l'individualisation des peines et à la prévention de la récidive est définitivement adopté par les deux chambres du Parlement.
Promulgation15 août 2014
Entrée en vigueur1er octobre 2014La majorité des dispositions de la loi sont effectives à compter du 1er octobre 2014.
De quoi s'agit-il ?
l'indIvidualisation de la peine
La peine et ses modalités d’exécution doivent répondre au niveau de gravité des faits sanctionnés et être adaptées à la situation du condamné.
- L'objectif est de mieux agir sur le risque de récidive et de favoriser la réinsertion du condamné. Pour être efficace et avoir du sens aux yeux du condamné, la peine doit être prononcée en connaissance de cause, le juge doit avoir les moyens de cerner la personnalité du condamné, son environnement et sa situation sociale. Concrètement, il s'agit de voir quels sont les risques de récidive et quels sont les facteurs favorisant la sortie de délinquance.
- Les députés ont voté, le 5 juin 2014, la suppression des peines planchers, introduites dans la législation en 2007. Ils ont ainsi abrogé les automatismes qui empêchent le juge de prononcer une peine individualisée.
- Une peine en milieu ouvert favorise la réinsertion des personnes condamnées.

Il faut que la peine soit adaptée à la gravité des faits, à son impact sur les victimes et au parcours du délinquant. Il faut aussi redonner de la marge de manoeuvre aux magistrats.
Christiane Taubira
Ministre de la Justice
Une nouvelle peine : la contrainte pénale
La contrainte pénale n'est ni un emprisonnement, ni un sursis avec mise à l'épreuve mais elle soumet le condamné à un ensemble d’obligations et d’interdictions et à un accompagnement soutenu pendant une durée qui peut aller jusqu’à 5 ans. La contrainte pénale est immédiatement mise en œuvre dès le prononcé de la peine.
Quelle application ?
La contrainte pénale permet un contrôle et un suivi renforcés. Elle concernera principalement des personnes majeures aujourd'hui condamnées à un sursis avec mise à l'épreuve (qui ne vont donc pas en prison) ou à de courtes peines d’emprisonnement. Elle peut être prononcée à l’égard des personnes qui ont commis des délits pour lesquels une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à 5 ans est encourue (vols, dégradations, délits routiers, violences...). Ainsi, elle ne concerne que les délinquants et en aucun cas les criminels.
La contrainte pénale sera applicable à tous les délits punis d’une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à 5 ans, jusqu’en 2017, avant d’être étendue aux autres délits. Un bilan de l’application de cette loi est ainsi prévu au terme d’un délai de deux années.
- Cette nouvelle peine sera exécutée immédiatement, contrairement aux peines de prison dont l’exécution est souvent retardée de plusieurs mois.
- C'est le juge d’application des peines qui fixera le contenu de la contrainte, qui comportera une part d’interdits (de se rendre dans certains lieux, de rencontrer certaines personnes, etc.), et une part constructive (programme de soins, d'insertion professionnelle, etc.). Si le condamné commet une nouvelle infraction pendant la durée de sa contrainte, ou s’il ne respecte pas les mesures et le suivi ordonnés par le juge d’application des peines, ce dernier pourra saisir un juge délégué pour ordonner son incarcération.
- La durée de la contrainte pénale sera de 6 mois à 5 ans.
- La réforme pénale renforcera le contrôle pouvant être exercé par les services de police et de gendarmerie sur les obligations et les interdictions imposées à la personne condamnée.
Quel bilan après 6 mois de mise en oeuvre?
Les six premiers mois d’application ont montré une montée en charge progressive du nouveau dispositif. Depuis le 1er octobre 2014, 536 contraintes pénales ont été prononcées par 100 tribunaux de grande instance.
Un tiers des affaires (33%) relèvent d’atteintes à la personne (majoritairement des faits de violences), un autre tiers (33%) du contentieux routier, puis 19 % d’atteintes aux biens (notamment des vols). Les infractions à la législation sur les stupéfiants ressortent à 7 %.
La durée des contraintes pénales la plus fréquente est de deux ans (47%), suivie de trois ans (23%). Parmi les obligations fixées par le juge, près de la moitié (48%) comportent une obligation de type « se soumettre à des mesures d’examen médical, de traitement ou de soins », 37 % « Exercer une activité professionnelle, suivre un enseignement ou une formation professionnelle » et 15 % « Réparer les dommages causés par l’infraction ».
À ce jour, compte tenu du caractère récent de cette peine, ces obligations sont majoritairement prononcées par le tribunal, le juge de l’application des peines étant en mesure d’en prononcer 4 mois après le prononcé par le tribunal. La durée de l’emprisonnement prévue pour inobservation de la contrainte pénale est pour 26% comprise entre 1 et 3 mois, 48 % entre 4 et 6 mois et 21% entre 7 mois et 1 an.
Quelques chiffres
- 93,9% des condamnations concernent des délits : 36,2% sont des délits routiers, 20% des atteintes aux biens, 15% des infractions à la législation aux stupéfiants et 14% des atteintes aux personnes.
- 1 délit sur 5 est puni d'emprisonnement ferme. 76% de ces peines sont inférieures à un an.
- 61% des condamnés sortant de prison sont à nouveau condamnés dans les 5 ans contre 32% pour des personnes initialement condamnées à un sursis avec mise à l'épreuve.
- 64% des Français considèrent que les aménagements de peine constituent un levier d’action efficace pour prévenir la récidive.
La libération sous contrainte
- Préparer la sortie de prison
76%
des personnes condamnées pour délit restent en détention moins d'un an et 56% moins de 6 mois.
Quelle que soit la durée de la peine d'emprisonnement prononcée et exécutée, la sortie de prison constitue toujours une étape décisive. Les conditions dans lesquelles elle s’opère pèsent fortement sur les risques de récidive. Les aménagements de peine favorisent la réinsertion de la personne condamnée et évitent le risque d'ancrage dans la délinquance.
- L'action du juge
98%
des personnes condamnées à une peine d'emprisonnement inférieure à 6 mois sortent sans suivi (« sortie sèche »).
C’est le juge qui apprécie comment se réalise la fin de peine. Pour réduire sensiblement le nombre de « sorties sèches », la réforme pénale prévoit la possibilité d’inclure, dans le cadre de l’exécution de la peine, une période de préparation à la sortie. En premier lieu, elle fixe un rendez-vous judiciaire obligatoire, vers la fin de la peine. Cet examen de la situation du détenu sera systématique. À l’issue de cet examen, le juge pourra prononcer une décision de libération sous contrainte ou décider du maintien en détention. Il pourra assortir sa décision de dispositions renforcées.
- Un contrôle et des obligations renforcées
Le renforcement des moyens
La justice est une priorité du Gouvernement. Tout comme en 2014, le projet de loi de finances pour 2015 prévoit un effort sensible pour mettre en œuvre la réforme pénale. Concrètement, l'effort se traduit par :
- une augmentation de 25% des effectifs du Service pénitentiaire d'insertion et de probation (recrutement de 1 000 conseillers d'ici à 2017, dont 400 dès 2014, 300 en 2015 et 300 sur 2016-2017) ;
- en 2013, nomination de 30 juges d'application des peines et création de 19 substituts chargés de l’exécution des peines ;
- en 2014, création de 40 emplois de greffes et 10 emplois de juge d’application des peines ;
- création de 6 500 places de prison supplémentaires d'ici à 2017. 530 ont déjà été livrées en 2013 et 1 200 le seront en 2014.
L'amélioration du droit des victimes
La réforme pénale ainsi que l’ensemble de la politique publique d’aide aux victimes améliorent les droits des victimes : information, accueil dans les tribunaux, indemnisation, soutien et accompagnement.
- Les droits de la victime seront mieux pris en compte tout au long de l’exécution de la peine : le droit à obtenir réparation du préjudice subi, le droit à être informée, si elle le souhaite, du devenir du condamné, et le droit à une protection. Le juge devra garantir ces droits.
13,7
millions d'euros, c'est le budget pour le soutien aux associations d'aide aux victimes en 2014.
- Le soutien aux associations d’aide aux victimes
La France bénéficie depuis 1983 d’un réseau d’associations d’aide aux victimes présentes sur tout le territoire et soutenues par le ministère de la Justice et d’autres partenaires locaux et nationaux. Ces associations ont accueilli en 2012 environ 300 000 personnes pour les informer de leurs droits et des procédures et leur proposer une écoute et un accompagnement personnalisés.
- La création d'une « sur-amende » de 10% pour financer les associations d'aide aux victimes. Elle s'appliquerait aux amendes pénales, douanières, ainsi qu'aux sanctions pécuniaires prononcées notamment par l'Autorité des marchés financiers ou l'Autorité de régulation des jeux en ligne.
- Un marché national a été lancé pour permettre la généralisation sur tout le territoire du service « Téléphone grand danger » pour les femmes victimes de violences.
- La généralisation des bureaux d’aide aux victimes
Les bureaux d’aide aux victimes ont été créés afin d’offrir un service d’accueil, d’écoute et d’information à l’intérieur des tribunaux. C’est un guichet unique permettant aux victimes d’être renseignées, accompagnées et orientées, depuis le dépôt de la plainte jusqu’à la phase d’exécution de la décision de justice. La garde des Sceaux a décidé leur extension à tous les tribunaux de grande instance en 2014, 100 nouveaux bureaux ont déjà ouvert en 2013.
- Une instance de concertation avec la société civile
Pourquoi ?
Entre 2002 et 2012, le droit pénal a été modifié plus de soixante-dix fois. Pourtant, le taux de récidive a plus que doublé de 2001 à 2011, passant de 4,9% à 12,1%. En outre le budget de l’aide aux victimes a souffert une baisse de 7,2 % entre 2009 à 2012 (passant de 11 à 10,2 millions d'euros).
Les réformes successives n’ont pas permis de démontrer leur efficacité pour mieux prévenir le risque de récidive et éviter de nouvelles victimes.
L'objectif de cette réforme est de punir plus efficacement en adaptant la peine à chaque délinquant pour mieux prévenir la récidive, mais aussi de renforcer les droits et garanties des victimes notamment pendant l'exécution de la peine. La loi créé aussi un nouveau dispositif d'indemnisation des victimes.
Les réformes successives n’ont pas permis de démontrer leur efficacité pour mieux prévenir le risque de récidive et éviter de nouvelles victimes.
L'objectif de cette réforme est de punir plus efficacement en adaptant la peine à chaque délinquant pour mieux prévenir la récidive, mais aussi de renforcer les droits et garanties des victimes notamment pendant l'exécution de la peine. La loi créé aussi un nouveau dispositif d'indemnisation des victimes.