
La préservation de la biodiversité
Saisi les 21 et 22 juillet 2016, le Conseil constitutionnel a validé la loi, le 4 août 2016, en jugeant conformes les articles dont il était saisi. Elle est publiée au Journal officiel, le 9 août 2016.
Une loi pour répondre concrètement aux enjeux de la biodiversité
La nouvelle loi sur la biodiversité consacre le principe de non régression dela protection de l'environnement. Ainsi, toute évolution législative future ne pourra faire l'objet que d'une amélioration constante de la protection de l'environnement.De plus, elle vient renforcer des dispositions déjà existantes en se dotant de moyens concrets pour lutter contre les cinq facteurs majeurs de perte de biodiversité, comme le rappelle Barbara Pompili :

Ce texte est à la fois réaliste et ambitieux, il apporte une solution aux cinq facteurs de perte de la biodiversité : l’artificialisation des terres, le risque de disparition d’habitats indispensables à la préservation de certaines espèces, la surexploitation des ressources, les pollutions, le développement d’espèces exotiques envahissantes et le changement climatique.
Un opérateur dédié à La biodiversité
La loi prévoit la création de l’Agence française pour la biodiversité (AFB). La nouvelle entité regroupera les quatres organismes déjà existants : l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques (Onema), l’Atelier technique des espaces naturels, l’Agence des aires marines protégées, les Parcs nationaux de France.Outil d’expertise et de pilotage unique, elle aura vocation à renforcer la connaissance, la recherche et la formation autour de la biodiversité. Forte des 1 200 personnes oeuvrant pour les organismes regroupées, l'Agence sera dotée d'un budget de 226 millions d’euros. Elle sera opérationnelle au 1er janvier 2017.
L’AFB sera le deuxième grand opérateur de l’État en matière d’environnement avec l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).
Un opérateur central et une référence institutionnelle
L'Agence française pour la biodiversité s'organise autour de trois pôles : Brest, Montpellier et Vincennes pour les services centraux. L'AFB sera l'interlocuteur de tous les acteurs de la biodiversité. Elle sera présente dans les territoires, y compris ultra-marins, avec des directions régionales et des services départementaux.
Au plus près du terrain. La loi donne aux régions et à l’Agence l’initiative de créer des agences régionales associant également les autres collectivités territoriales et les acteurs du domaine, entreprises et associations. Les agences régionales de la biodiversité, en lien avec les départements, permettent d'agir au plus près de la réalité et d'apporter les réponses les plus adéquates pour améliorer la biodiversité.
Un séminaire de travail avec les régions s'est d'ores et déjà tenu, le 5 juillet 2016, sur les agences régionales de biodiversité pour consolider le lien entre les politiques nationales et locales. "Une des missions centrales de mon action est de faciliter le dialogue, favoriser le contact entre les collectivités et l’Agence pour que ces synergies voient le jour : préservation de la biodiversité et décentralisation doivent aller de pair, c’est une condition de la réussite de notre ambition commune", a précisé Barbara Pompili (18 mars 2016).
Les missions de l'AFB :
- rassembler les moyens de l’État pour aider plus efficacement les projets en faveur de la biodiversité terrestre et marine et de l’eau : 1200 agents et au moins 226 millions d’euros de budget ;
- appui technique, conseil et expertise à destination de l’ensemble des acteurs : collectivités, entreprises, associations de protection de la nature, etc. ;
- faciliter la constitution des trames vertes et bleues et les projets écologiques ;
- gestion d’aires protégées et exercice des missions de police de l’eau ;
- représentation des acteurs français de la biodiversité et de l’eau au sein des instances internationales et européennes ;
- amélioration des connaissances sur la biodiversité ;
- appui à la formation initiale et continue des professionnels.
Pour un autre regard sur la biodiversité

La biodiversité doit être considérée comme un axe majeur de la lutte contre le changement climatique en accentuant ses capacités de séquestration et de stockage du carbone.
La biodiversité nous soigne, nous nourrit, nous habille… Elle est partout, indispensable à notre vie quotidienne. La biodiversité nous rend aussi d’innombrables services. Mais elle est menacée par les pressions qui s’exercent sur elle : pollution, réchauffement climatique, artificialisation des sols…
La loi a pour objectif de mieux concilier activités humaines et biodiversité. C’est une nouvelle approche : il ne s’agit plus simplement de prendre des mesures de protection figées, mais d’appréhender la biodiversité comme une dynamique globale, incluant et interagissant avec la vie humaine. La reconnaître, c’est mieux l’intégrer dans les processus de décision et d’action.
Cette notion intègre les interactions qui existent entre les différents organismes précités, tout comme les interactions entre ces organismes et leurs milieux de vie. D’où sa complexité et sa richesse.
La biodiversité est le support direct ou indirect de multiples activités humaines allant de l’alimentation à la médecine, en passant par l’élevage, les textiles ou les cosmétiques. Elle est source de bénéfices dont nous tirons parti. Certains de ces bénéfices sont comptabilisés et visibles dans notre économie, comme les emplois ou les biens agricoles, d’autres non, comme la régulation de la qualité de l’eau, l’importance des paysages ou des forêts. La biodiversité est également une source d’innovation et représente une valeur potentielle importante à préserver.
La biodiversité rend des services formidables
La loi introduit la notion de services écosystémiques, c’est-à-dire les services rendus par la biodiversité qui contribuent aux activités humaines. Si l’évaluation complète des services rendus, et donc le coût de leur disparition, ne sont pas encore connus, plusieurs études ont montré l’importance de la biodiversité en tant que capital économique extrêmement important.
La biodiversité est source d’innovations et d’emplois
Potentiel quasi illimité, la biodiversité offre une source d’innovations précieuse. Que ce soit par les techniques de biomimétisme qu’elle inspire ou par les substances actives qu’elle procure, comme les ressources génétiques utilisées dans les domaines pharmaceutique, agroalimentaire, biotechnologique ou cosmétique, la biodiversité détient une valeur économique exceptionnelle. En consacrant cette valeur potentielle importante, la loi affiche ce formidable levier économique à préserver.
Le génie écologique, c’est-à-dire les activités liées à la restauration ou à la création de milieux naturels, a permis la création d’un réseau de plus de 150 petites et moyennes entreprises et l’investissement de grandes entreprises dans le secteur. (Source : CDC Biodiversité, 2013).
vers un partage plus juste des ressources
La biodiversité est un bien commun. Il est donc légitime que les avantages tirés de son exploitation soient partagés. L'objectif de la loi est de lutter contre la "biopiraterie" en partageant les avantages découlant de l'utilisation des ressources génétiques d'une manière juste et équitable.La "biopiraterie" est l’appropriation par une entreprise ou un laboratoire de recherche d’une ressource génétique ou d’une connaissance traditionnelle liée à une telle ressource, sans l’accord ni la rémunération de leur détenteur. La France, pays riche en biodiversité et doté de secteurs pharmaceutique, cosmétique et agroalimentaire majeurs, est à la fois un pays fournisseur et utilisateur de ressources génétiques et de connaissances traditionnelles associées.
Ces ressources génétiques ont une importante valeur d’option, car les sociétés humaines doivent pouvoir puiser dans un large capital de ressources génétiques pour assurer leur adaptabilité et leur sécurité alimentaire, pour la conception de nouveaux médicaments, l’amélioration génétique des races d’animaux domestiques ou la sélection de plantes adaptées aux conditions locales.
La loi instaure un dispositif pour garantir un partage juste et équitable des avantages issus de l’utilisation des ressources génétiques. Il prévoit ainsi :
- que l'État, fournisseur des ressources, organise un partage des bénéfices tirés des ressources génétiques ;
- le partage des connaissances traditionnelles d'une communauté liées aux ressources génétiques.
La création de zones de protection en mer et dans les fleuves
Le texte propose, en harmonie avec les activités humaines, de créer des zones en mer ou dans les fleuves qui protègent le cycle biologique de certaines espèces de poissons. En effet, du bon état de certaines zones dépend celui de la biodiversité marine. La préservation du milieu marin dans toutes ses composantes aura une place privilégiée dans la future Agence nationale pour la biodiversité.Un périmètre de protection sera délimité en mer et en rivière, là où se déroulent les moments essentiels du cycle du poisson.
Une fois cet espace délimité, un plan de suivi sera défini par l'État pour concilier les différents usages et instaurer des mesures d'interdiction ou de réglementation des activités humaines qui pourraient avoir des impacts négatifs.
Cette loi prévoit également :
- des mesures pour encadrer les nouvelles activités en évaluant leurs incidences environnementales et en prévoyant la remise en état des sites à l'issue de l'exploitation ;
- une gestion renouvelée du domaine public maritime ;
- un renforcement des moyens d'action du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages proches de zones d'eau.
Les eaux de ballast sont issues des cuves des bateaux et peuvent véhiculer des organismes nuisibles. On estime à 5 milliards de tonnes la quantité de ces eaux polluées qui sont déversées chaque année sans aucun contrôle.
Avec cette mesure, la France applique enfin la convention internationale pour la gestion des eaux de ballast adoptée en 2004 par l’Organisation maritime internationale. Cette mesure intervient en complément de la décision d’interdire, à compter du 1er juillet 2016, l’utilisation de sacs plastiques non réutilisables, qui bien souvent se retrouvent dans l’environnement et menacent en particulier la vie marine.
Mieux protéger les espèces menacées
Le trafic d'espèces menacées serait le 4e au monde après ceux de la drogue, la contrefaçon et le trafic d'êtres humains. La criminalité organisée liée aux espèces sauvages, qu'elles soient terrestre ou marine, est devenue une menace pour la conservation de la biodiversité, l'économie et le patrimoine culturel mais aussi pour la sécurité et la stabilité politique de nombreux pays. La lutte contre le braconnage est une priorité nationale pour éviter l'extinction de certaines espèces. La loi prévoit l'augmentation des sanctions à l'encontre des trafiquants et une amélioration des échanges de données entre organismes compétents pour renforcer l'action collective.Afin que les montants fixés soient davantage en adéquation avec les gains générés par les trafics d’espèces protégées et conformément aux engagements du président de la République, lors de la table ronde en marge du Sommet de l’Élysée pour la paix et la sécurité en Afrique de décembre 2013, la loi prévoit d’aggraver les sanctions :
- les amendes encourues en cas d’infraction simple sont décuplées : passage de 15 000 à 150 000 euros ;
- les amendes encourues en cas de trafic en bande organisée : passage de 150 000 à 750 000 euros.
La lutte contre le braconnage, une priorité nationale
Pour se doter d'un dispositif de lutte parmi les plus exigeants de l'Union européenne en termes de sanctions et de coordination, la France s'est engagée sur un plan national d'actions aux niveaux national, européen et international, intitulé Lutte contre la braconnage d'éléphants et contre le trafic d'ivoire et d'autres espèces protégées.
Graduer les outils pour agir et innover
La loi modernise le droit de l’environnement pour permettre de concilier développement économique et protection de la nature.
Il renforce ce qui fonctionne :
- faciliter l’action des 51 parcs naturels régionaux créés par la loi paysage de 1993 ;
- appuyer le fonctionnement du Conservatoire du littoral et des rivages lacustres qui fête ses 40 ans et gère 160 000 hectares. Spécificité française, il permet à tous un accès libre et aménagé au littoral français ;
- accélérer la constitution des trames vertes et bleues ;
- adapter au cas particulier de la pêche maritime les obligations d’évaluation d’études d’incidences dans les sites Natura 2000 en mer ;
- créer de nouveaux outils comme les obligations réelles environnementales pour faciliter notamment la mise en œuvre des mesures de compensation sur le long terme sans passer par l’acquisition : haies, bosquets, mares, etc.
Replacer le paysage du quotidien au centre de la politique du paysage
Parce que le paysage est un élément essentiel de notre cadre de vie, la loi entend lui donner une place nouvelle afin que, dans les projets de développement et d'aménagement, les différents paysages soient mieux pris en compte. L'objectif est d'allier qualité paysagère et paysage du quotidien. Il conforte la loi paysages de 1993 en se donnant les moyens d’appréhender les paysages dans une logique dynamique et évolutive et non pas dans une logique de conservation et de contrainte.- Le paysage ne se réduit pas seulement à des zones protégées.
- La loi réaffirme l’importance de prendre en compte les paysages de la vie quotidienne.
- Le paysage devient une réalité au service de la qualité du cadre de vie, fédératrice des projets de territoire.
- L’amélioration de la prise en compte des paysages repose ainsi en particulier sur la formulation d’objectifs de qualité paysagère.
Trois options seront possibles dans les 10 ans :
- faire des sites inscrits des zones tampons complémentaires des sites classés ;
- mettre fin à l’inscription, par décret, des sites dont la dégradation est irréversible ;
- confirmer, par arrêté ministériel, les sites inscrits qui ont fait preuve de leur efficacité et qui n’ont pas vocation à être classés.
Un atlas de paysages
Les atlas de paysages ont pour objet d’identifier, de caractériser et de qualifier, objectivement, l’ensemble des paysages qui composent notre territoire, conformément à l’engagement de la France pris lors de la ratification de la Convention européenne du paysage. Ce sont donc des documents de connaissance partagée, dans lesquels sont identifiées les caractéristiques de chaque paysage, les valeurs qui leur sont attachées, ainsi que les dynamiques et les pressions qui les modifient. Aujourd’hui, 85 départements sont couverts par un atlas. La loi se fixe comme objectif la réalisation d’un atlas dans tous les départements. Et ceux-ci devront être actualisés tous les 10 ans.
Sites inscrits et classés
La procédure d'inscription a permis de mettre sous surveillance des sites pour lesquels la mesure d'inscription a pu se révéler suffisante. Beaucoup n'ont jamais évolué vers un classement. La loi propose de modifier les dispositions législatives relatives aux sites inscrits, en supprimant la procédure d'inscription pour le futur et en organisant l'évolution pour les sites inscrits existants.
Préserver les abeilles et pollInisateurs sauvages
Les insecticides de la famille des néonicotinoïdes ont un effet sur le système nerveux des abeilles et de récentes études scientifiques révèlent un effet possible sur le développement cérébral des êtres humains. "Nous connaissons aujourd’hui ces effets et il faut avoir le courage d’appliquer le principe de précaution", explique un communiqué de presse de Ségolène Royal du 18 mars 2016.L’amendement interdisant les produits phytosanitaires contenant des néonicotinoïdes a été adopté par les députés lors de la seconde lecture du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, le 18 mars 2016. Ségolène Royal et Stéphane le Foll se sont félicités de cette avancée. "Avec le vote de cet amendement, complémentaire au Plan "France, terre de pollinisateurs" [...], les services rendus par les abeilles, estimés à hauteur de 1,5 milliard d’euros par an pour la France, seront mieux préservés et valorisés", s'est réjouie Ségolène Royal.
Pour Stéphane le Foll, "l’urgence, est désormais l’évaluation des solutions de substitution au regard de leur efficacité pour la lutte contre les ravageurs et de leurs impacts sur la santé et l’environnement et, en particulier, sur les abeilles".
Les députés ont rétabli une décision déjà votée en première lecture à l’Assemblée puis supprimée au Sénat. Cette décision va préparer l’avenir et protéger les abeilles et les services qu’elles nous rendent.
Le plan "France, terre de pollinisateurs"
Présenté par Ségolène Royal lors du Conseil des ministres du 20 mai 2015, ce plan a pour objectifs :
- d’appliquer sur 20% du territoire les pratiques favorables aux abeilles et aux pollinisateurs ;
- d’augmenter de 30% les populations d’abeilles et de pollinisateurs sur les bordures vertes des routes françaises en généralisant le fauchage tardif ;
- d’installer 5 000 gîtes à insectes et ruchers avec les collectivités ;
- d’atteindre zéro perte d’espèce de pollinisateur.
- une saisine de l’Anses pour examiner quelles nouvelles interdictions appliquer en France et dans quel calendrier en prenant en compte les réévaluations européennes ;
- l’accélération de la réévaluation scientifique par l’Agence européenne de sécurité sanitaire des aliments (AESA) ;
- la valorisation des projets territoriaux visant la suppression des néonicotinoïdes et le développement des alternatives au travers du plan Ecophyto 2 tel que mis en place par Ségolène Royal et Stéphane Le Foll.
Suite à ma saisine, l’avis de l’Anses de janvier 2016 sur l’extension du moratoire sur les insecticides néonicotinoïdes avait permis d’alerter sur la nécessité d’agir rapidement. [...] Je suis satisfaite que les débats sur le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages aient pu aboutir à une position ambitieuse qui est le fruit de l’évolution des connaissances scientifiques et des travaux des parlementaires. Le 28 mars 2016
Mers et océans : développer la croissance bleue
Le milieu marin, et particulièrement la zone côtière, accueille un nombre sans cesse croissant d’activités humaines (pêche, tourisme, énergies marines, extraction de granulats). C’est aussi en mer que se retrouve un nombre toujours plus grand de pollution et de déchets.L’objectif de cette loi est de protéger les zones fonctionnelles halieutiques en créant des protections localisées de la ressource :
- un périmètre de protection sera délimité en mer et en rivière, là où se déroulent les moments essentiels du cycle du poisson ;
- le classement pourra concerner un espace en mer situé entre 0 et 12 milles marins des côtes ainsi qu’une zone fluviale ;
- dans un premier temps, une liste recensera les types de zones fonctionnelles halieutiques d’importance.
- Une fois cet espace délimité, un plan de suivi sera défini pour concilier les différents usages et instaurer des mesures d’interdiction ou de réglementation des activités humaines qui pourraient avoir des impacts négatifs.
Pourquoi ?
Alors que l’Observatoire national de la biodiversité (ONB) confirme, dans son bilan 2016, l’exceptionnelle richesse du patrimoine culturel de la France, celui-ci juge toutefois inquiétante l’évolution de la biodiversité française, qu’il s’agisse de l’évolution des espèces, de l’état des habitats et milieux naturels, des pollutions ou de la progression des espèces exotiques envahissantes.
La communauté scientifique internationale estime que la moitié des espèces vivantes que nous connaissons pourrait disparaître d’ici à un siècle, compte tenu du rythme actuel de leur disparition (100 à 1000 fois supérieur au taux naturel d’extinction). Une extinction progressive causée par les activités humaines. Pour enrayer ce mouvement, il convient d'intensifier les actions de connaissance, de prévention et de lutte pour la préservation et la reconquête de la biodiversité.